Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/362

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dans ce moment, est précisément de vous jouer de la flûte ; et si vous le voulez, la danse s’ensuivra, et pourra être profitable à Votre Grâce. — Sur ma parole, maître Christian, » dit le duc avec hauteur, « il faut que cette affaire soit d’une nature bien importante pour bannir ainsi tout cérémonial entre nous. Si elle est relative à notre dernier sujet de conversation, je dois vous prier de remettre notre entretien à une autre occasion. Je suis en ce moment occupé d’une affaire qui a une certaine importance. » Tournant alors le dos à Christian, il reprit sa conversation avec Jerningham.

« Va trouver la personne que tu sais, et donne-lui ces papiers ; attends, donne-lui cet or, pour payer le bois des flèches en question ; quant au fer et aux plumes, nous l’en avons déjà munie. — Tout cela est fort bien, milord, » dit Christian d’un air calme et en s’asseyant dans un fauteuil à quelque distance ; « mais la légèreté de Votre Grâce ne saurait l’emporter sur mon impassibilité. Il est nécessaire que je vous parle, et j’attendrai le loisir de Votre Grâce dans cet appartement. — Très-bien, monsieur, » dit le duc d’un ton de mauvaise humeur ; « lorsqu’un mal est inévitable, il faut tâcher de s’en débarrasser le plus vite possible. Je prendrai des mesures à l’avenir, pour empêcher qu’il ne se renouvelle. Voyons donc sans délai ce que vous avez à me dire. — J’attendrai que la toilette de Votre Grâce soit achevée, » dit Christian avec son imperturbable sang-froid ; ce que j’ai à vous dire ne doit être connu que de nous deux. — Sortez ! Jerningham, et attendez que je vous appelle. Laissez mon habit sur ce sopha… Quoi ! encore cet habit de drap d’argent ! je l’ai porté cent fois. — Deux fois seulement milord, répliqua Jerningham. — Deux fois, cent fois, qu’importe ? Gardez-le pour vous, ou donnez-le à mon valet de chambre, si votre gentilhommerie orgueilleuse se refuse à l’accepter. — Votre Grâce a fait porter ses habits de rebut à de plus grands personnages que moi, dit Jerningham, en acceptant l’habit d’un air reconnaissant.

« Voilà de la malice, Jerningham, dit le duc ; tu as raison dans un sens : cela est arrivé, et cela peut arriver encore. Cet habit couleur de perle t’ira fort bien avec la jarretière et le ruban de Saint-George. Allons, va-t-en maintenant. Eh bien ! monsieur Christian, le voilà parti : puis-je vous demander encore une fois ce qui vous amène ? — Milord duc, vous aimez les difficultés dans les affaires d’amour. — J’espère, monsieur Christian, que vous