Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/306

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Bridgenorth fit alors signe à Julien de le suivre, ce qu’il fit, accompagné ou plutôt conduit par les deux gardes qui l’avaient d’abord désarmé. Quand ils eurent atteint le vestibule, Bridgenorth demanda à Julien s’il voulait se considérer comme prisonnier sur parole, « Dans ce cas, lui dit-il, je me contenterai de votre simple promesse pour toute garantie. »

Peveril, qui ne pouvait s’empêcher de concevoir quelques espérances, d’après la manière favorable et étrangère à tout ressentiment dont il était traité par un homme à la vie duquel il venait d’attenter, répondit sans balancer qu’il lui donnait sa parole, pour vingt-quatre heures, qu’il ne ferait aucune tentative d’évasion.

« C’est parler sagement, répliqua Bridgenorth ; car, bien qu’il pût résulter quelque effusion de sang de vos efforts pour recouvrer la liberté, soyez assuré qu’une telle conduite ne serait d’aucune utilité pour vos parents. Holà ! des chevaux ! des chevaux dans la cour ! »

Le piétinement des chevaux se fit bientôt entendre ; Julien, obéissant au signal de Bridgenorth, et fidèle à sa parole, monta sur celui qui lui fut présenté, se préparant à quitter la maison de ses ancêtres, dans laquelle son père était prisonnier, pour aller il ignorait où, sous la garde d’un homme qu’il savait être l’ancien ennemi de sa famille. Il fut surpris de voir que Bridgenorth se disposait à partir avec lui sans aucune suite.

En traversant la cour, Bridgenorth lui dit ; « Tout le monde ne compromettrait pas sa sûreté en voyageant ainsi, pendant la nuit et sans escorte, avec un jeune homme à cervelle bouillante qui cherchait, il n’y a qu’un moment, à m’ôter la vie. — Monsieur Bridgenorth, répondit Julien, je pourrais vous dire avec vérité que je ne vous avais pas reconnu lorsque je dirigeai mon arme contre vous ; mais je dois ajouter que, quand même je vous eusse reconnu, la cause qui me portait à cette violence m’eût peut-être empêché de respecter davantage votre personne. À présent, je vous connais : je n’ai, vous le savez bien, aucune mauvaise intention à votre égard ; je n’ai pas non plus à défendre ici la liberté d’un père. D’ailleurs vous avez ma parole ; quand un Peveril y a-t-il jamais manqué ? — Oui, répliqua Bridgenorth, un Peveril, un Peveril du Pic ! nom qui a long-temps résonné dans le pays comme une trompette de guerre, mais qui vient peut-être de se faire entendre pour la dernière fois. Retournez-vous, jeune