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cette époque, son dévouement pour son roi eut d’autant plus de mérite qu’il fut presque toujours forcé de se séparer de sa jeune épouse : il ne la vit que par intervalles très-courts et lorsque son devoir lui permettait de venir passer quelques instants chez lui. Sacrifiant à ses devoirs militaires les charmes et le bonheur de la vie domestique, Peveril combattit pendant plusieurs années de la guerre civile, et se conduisit avec une bravoure réelle jusqu’au moment où son régiment fut surpris et taillé en pièces par Poyntz, général aussi heureux qu’entreprenant, qui commandait la cavalerie de Cromwell. Le cavalier[1] vaincu échappa à la déroute, et comme un vrai descendant de Guillaume-le-Conquérant, dédaignant de se soumettre, il se retrancha dans son château fortifié, lequel soutint un de ces sièges irréguliers qui causèrent la destruction de tant de demeures baronniales pendant le cours de ces années désastreuses. Martindale-Castle, après avoir cruellement souffert du canon qui y fut braqué par les ordres de Cromwell, se rendit enfin, mais seulement à la dernière extrémité. Sir Geoffrey fut fait prisonnier, et lorsqu’il recouvra sa liberté, qui ne lui fut rendue que sous la promesse de rester à l’avenir sujet fidèle de la république, il eut à subir pour châtiment de ses fautes passées la peine sévère d’une amende et du séquestre de ses biens.

Mais ni cette promesse forcée, ni la crainte des conséquences fâcheuses qui en pouvaient résulter pour sa personne ou ses propriétés, ne purent empêcher Peveril du Pic d’aller rejoindre le vaillant comte de Derby, la nuit qui précéda la funeste bataille de Wiggan-Lane, ou les troupes du comte furent défaites et dispersées. Sir Geoffrey prit part à cette action, et ayant effectué sa retraite avec les débris de l’armée royaliste, il alla rejoindre Charles II. Il assista aussi à la bataille de Worcester, où son parti fut défait complètement et où il fut fait prisonnier pour la seconde fois. Comme il était, dans l’opinion de Cromwell et selon le langage du temps, un malveillant obstiné, il courut grand risque de partager le sort du comte de Derby, qui fut exécuté à Bolton-le-Moor, ainsi qu’il avait partagé fidèlement avec lui les dangers de la guerre. Mais sir Geoffrey dut la conservation de sa vie à l’intercession d’un ami qui avait de l’influence sur l’esprit d’Olivier. Cet ami était M. Bridgenorth, homme de moyenne classe, dont le père avait eu quelque succès dans les affaires commerciales

  1. Titre adopté par ceux qui prenaient les armes pour le roi. a. m.