Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/261

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je ne me trouverai point en défaut lorsqu’il sera question de porter témoignage sur la hauteur et la profondeur, la largeur et la longueur de cet infernal complot contre le roi et l’Église protestante. »

Fatigué et dégoûté du colloque si naïvement brutal de ces étranges personnages, Peveril se hâta de régler avec Bridlesley, et prit enfin son cheval gris par la bride pour l’emmener ; mais il était à peine hors de la cour du maquignon, qu’il éprouva une certaine inquiétude en entendant la conversation suivante, dont il paraissait être l’objet.

« Quel est ce jeune homme, » demanda d’une voix lente et douce le plus concis des deux recors de Topham. Il me semble que je l’ai vu quelque part. Est-il de ce pays ? — Non pas que je sache, » répondit Bridlesley, qui, de même que tous les habitants de l’Angleterre à cette époque, répondait aux questions de ces drôles avec le même respect qu’on a en Espagne pour celles d’un inquisiteur. « C’est un étranger, tout à fait étranger, en vérité. C’est la première fois que je le vois. Un jeune poulain sauvage, j’en réponds : il connaît aussi bien que moi la bouche d’un cheval. — Je commence à croire que j’ai vu une figure comme la sienne à l’assemblée des jésuites qui se tient à la taverne du Cheval-Blanc, dit Éverett. — Et moi, dit le capitaine Dangerfield, je crois me souvenir… — Allons, allons, maître et capitaine, » cria la voix impérieuse de Topham, « nous n’avons pas besoin de vos souvenirs à présent ; nous savons d’avance où ils tendent. Mais il est bon que vous sachiez que vous ne devez courir le gibier que lorsque vous n’êtes plus en laisse. Ce jeune homme a bonne mine, et il a cédé son cheval de bonne grâce lorsqu’il a été question du service de la chambre des communes. Il sait comment on doit se conduire envers ses supérieurs, je vous le garantis, et je doute qu’il ait assez d’argent dans sa bourse pour payer les frais de son arrestation. »

Ainsi finit ce dialogue, que Peveril crut devoir écouter jusqu’au bout, puisqu’il était si fort intéressé à savoir quelle en serait la conclusion. Maintenant il jugea que le parti le plus prudent était de sortir de la ville sans être observé, et de prendre le chemin le plus court pour se rendre au château de son père. Il avait réglé son compte à l’auberge où il était descendu en arrivant, et il avait apporté chez Bridlesley sa petite valise, de manière qu’il n’avait pas besoin d’y retourner. Il résolut donc de faire quelques milles sans s’arrêter, même pour faire donner l’avoine à son cheval :