PEVERIL DU PIC
CHAPITRE PREMIER.
LE CAVALIER ET LA TÊTE-RONDE.
Guillaume-le-Conquérant, vainqueur de l’Angleterre, fut ou du moins se croyait le père d’un certain William Peveril, qui le suivit à la bataille d’Hastings, et s’y distingua. Il n’était pas vraisemblable que ce monarque, d’un esprit indépendant et dégagé de tout préjugé, qui prenait dans ses chartes le titre de Gulielmus Bastardus, souffrît que l’illégitimité de son fils fût un obstacle à sa faveur royale, surtout quand les lois de l’Angleterre avaient été dictées par la bouche d’un vainqueur normand qui pouvait disposer d’une manière illimitée des terres et des biens des Saxons. William Peveril obtint donc la concession de riches propriétés et de seigneuries dans le Derbyshire[1] : ce fut lui qui éleva cette forteresse gothique qui, suspendue au-dessus de l’entrée de la Caverne du Diable, si bien connue de tous les voyageurs, donne le nom de Castletown[2] au village voisin.
Ce baron féodal, se conformant aux principes d’après lesquels l’aigle choisit son aire, avait bâti sa demeure comme si c’eût été, ainsi que le dit un Irlandais au sujet des tours de Martello, avec la seule intention de laisser à la postérité l’embarras de déterminer quel avait pu être le motif réel d’une telle construction. C’est de lui que descend, ou que l’on présume être descendue, car cette généalogie est assez hypothétique, une famille opulente du comté de Derby, dont le chef portait le titre de chevalier. Le grand fief de Castletown, avec ses landes, ses forêts adjacentes et toutes les merveilles qui en dépendent, avait été confisqué sous le règne orageux du roi Jean, et un William Peveril en avait été dépouillé en faveur de lord Ferrers. Cependant les descendants de ce William, quoique dépossédés d’un domaine qui, selon eux,