Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/245

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répondit Peveril. À présent, comme je crois inutile de différer l’exécution d’un projet une fois arrêté, permettez-moi de vous demander quelles sont les intentions de Votre Seigneurie relativement à mon départ. — Il doit être subit et secret, dit la comtesse ; l’île est remplie d’espions, et je serais désolée que quelqu’un d’eux eût le moindre soupçon qu’un de mes envoyés est sur le point de quitter l’île de Man pour se rendre à Londres. Pouvez-vous être prêt à vous embarquer demain ? — Ce soir même, à l’instant, si vous le voulez, dit Julien ; j’ai fait tous mes préparatifs. — Tenez-vous donc prêt, dans votre appartement, à deux heures après minuit. J’enverrai quelqu’un vous avertir ; et songez que notre secret doit avoir le moins de confidents possible. Votre passage est retenu à bord d’un sloop étranger. Vous vous rendrez ensuite à Londres par Martindale-Castle ou par tout autre chemin, comme vous le jugerez à propos. Lorsqu’il sera temps d’annoncer votre départ, je dirai que vous êtes allé voir vos parents. Encore un mot : en partant de Withehaven vous voyagerez à cheval. Vous avez des lettres de change, il est vrai ; mais avez-vous assez d’argent comptant pour vous procurer un bon cheval ? — J’en ai suffisamment, madame, et le Cumberland abonde en excellents chevaux : il y a là des gens qui savent le moyen d’en avoir de fort bons à un prix raisonnable. — Ne vous fiez pas à cela, dit la comtesse. Voilà ce qui vous donnera le meilleur cheval de la frontière. Allons, seriez-vous assez enfant pour me refuser ? » ajouta-t-elle en le forçant d’accepter une bourse pesante. « Un bon cheval, Julien, et une bonne épée, sont, après un bon cœur et une bonne tête, ce qui convient le mieux à un cavalier accompli. — Je prends donc congé de vous, madame, dit Peveril, et vous prie humblement de croire que, s’il me manque quelque chose pour réussir dans mon entreprise, ce ne sera jamais la ferme volonté de servir ma noble parente, ma bienfaitrice. — Je le sais, mon ami, je le sais ; et puisse Dieu me pardonner si mes inquiétudes pour mon fils vous exposent à des dangers qui devraient être les siens ! Allez, et que les saints et les anges vous protègent ! Fenella se chargera d’apprendre à Philippe que vous soupez dans votre appartement. Je souperai aussi dans le mien ; car, en vérité, je serais incapable, ce soir, de soutenir les regards de mon fils. Je suis loin de m’attendre à des remercîments de sa part, quand il apprendra que c’est vous que j’ai chargé de sa mission ; et bien des gens se demanderont si j’ai agi d’une manière digne de la