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le donneur de conseils fut hors de portée, elle s’écria avec un peu d’humeur : « Sur ma foi, vous pouvez garder vos avis, vieux chaudronnier écossais que vous êtes ; mon mari est aussi prudent et presque aussi vieux que vous, et s’il ne trouve rien à dire, cela suffit. Quoiqu’il ne soit pas aussi riche que certaines gens, cependant j’espère bien le voir un jour sur une mule, tout comme eux, avec une selle de drap et deux domestiques en habit bleu derrière lui. »



CHAPITRE V.

LE CABINET DU ROI JACQUES.


Pourquoi ne venez-vous pas à la cour ? C’est le spectacle le plus amusant du monde ! On y voit briller la soie et les diamants. Le sot y parle et le sage écoute, le fanfaron y coudoie le vrai brave ; le mendiant s’y glisse à côté du grand seigneur. C’est là qu’en badinant les mignons et les beaux parleurs assassinent les honnêtes gens. Pourquoi ne venez-vous pas à la cour ? Skelton jure que c’est le plus grand des plaisirs.
Skelton skeltonisé.


Ce n’était pas entièrement par ostentation que le bienveillant bourgeois était monté et accompagné de la manière qui avait excité chez la dame Christie un petit mouvement d’humeur : et ce mouvement, il faut l’avouer, finit entièrement avec le petit soliloque que nous avons rapporté. Le brave homme, outre le désir bien naturel qu’il avait de se montrer de la manière qui convenait à un riche marchand, se rendait alors à White-Hall pour présenter au roi un morceau d’un travail curieux, et que Sa Majesté, pensait-il, serait bien aise de voir ou peut-être même d’acheter. Il montait donc sa mule richement caparaçonnée, afin de traverser plus commodément les rues étroites, sales et populeuses ; et tandis que l’un de ses domestiques portait sous son bras la pièce d’argenterie soigneusement enveloppée dans un morceau de serge rouge, les deux autres veillaient à la sûreté de leur maître : car tel était alors l’état de la police dans la métropole, qu’on voyait souvent des gens assaillis en pleine rue par motif de vengeance ou de pillage ; et ceux qui craignaient d’être attaqués étaient généralement dans l’usage, lorsque leur fortune le leur permettait, de se faire escorter par leurs domestiques armés. Cette coutume, qui d’abord avait été limitée aux nobles et aux gentilshommes,