Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/449

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sa Majesté tira l’orfèvre dans un coin, tandis que les conseillers, à l’exception de ceux qui avaient l’ordre de rester, saluèrent et se retirèrent. « Geordie, dit le roi, mon bon et fidèle serviteur (ici il se mit à tortiller de nouveau les aiguillettes et les rubans de son pourpoint), vous voyez que nous venons d’accorder, d’après notre sentiment naturel de justice, ce que votre grand diable de Moniplies, c’est ainsi, je crois, que vous l’appelez, offrit de nous acheter, par un beau présent que nous refusâmes, comme doit le faire un roi couronné qui ne veut vendre ni sa justice ni sa clémence pour aucune considération pécuniaire… Maintenant que croyez-vous qu’il résulte de tout cela ? — La liberté de lord Glenvarloch et sa rentrée en grâce auprès de Votre Majesté, répliqua Heriot. — Je sais cela, » dit le roi avec dépit ; « vous ne saisissez pas promptement aujourd’hui ! Je vous demande ce que vous croyez que ce Moniplies pensera de cette affaire ? — Il pensera, assurément, que Votre Majesté est le meilleur et le plus indulgent des souverains, répondit Heriot. — Nous avons besoin de bonté et d’indulgence, » dit le roi avec plus d’humeur, « quand nous avons autour de nous des imbéciles qui ne veulent pas comprendre notre pensée, à moins que nous ne l’expliquions tout crûment en anglais. Vous verrez ce drôle, ce Moniplies, monsieur, et vous lui direz ce que nous avons fait de notre propre mouvement pour lord Glenvarloch, auquel il prend tant d’intérêt, quoique nous eussions refusé de le faire pour aucun avantage qu’il nous eût offert. Ensuite, vous lui ferez comprendre, comme si cela venait de vous-même, qu’il ne serait pas honnête, ni du devoir d’un fidèle sujet, de presser le paiement actuel de deux ou cinq cents misérables livres sterling, pour lesquelles nous avons été obligé d’engager ces bijoux… Je dirai plus même : il y a bien des gens qui penseraient que ce serait agir en bon citoyen que de lui en refuser le paiement, puisqu’il a obtenu ce qu’il regardait comme une satisfaction entière, en considérant surtout qu’il ne paraît avoir aucun besoin pressant d’argent, tandis qu’au contraire nous sommes nous-même dans une grande pénurie. »

George Heriot soupira intérieurement, « Ô mon maître pensa-t-il, mon cher maître ! est-il donc ordonné que vous ne vous livrerez jamais à aucun sentiment vraiment noble et royal sans qu’il soit souillé par quelque arrière-pensée d’intérêt ? »

Le roi ne s’inquiéta guère de ce qu’il pensait, mais le prenant