Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/396

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vous êtes jeune, que cette femme est jolie, et même, à ce que j’ai remarqué, un peu légère. Apprenez-moi où elle est. Son bonhomme de mari a encore quelque compassion d’elle ; il veut la mettre à l’abri de l’infamie, et peut-être même, avec le temps, la reprendra-t-il ; car nous sommes une bonne espèce de gens, nous autres marchands. Ne cherchez pas, milord, à imiter ceux qui font le mal pour le plaisir de le faire… c’est le pire attribut du démon lui-même. — Vos sévères remontrances me rendront fou : elles ont une apparence de sens et de raison ; et cependant c’est insister positivement pour que je vous apprenne une chose dont je n’ai pas la moindre connaissance. — Fort bien, milord » ; répondit froidement Heriot. « Vous avez sans doute le droit de garder votre secret, de quelque nature qu’il soit ; mais, puisque c’est si vainement que je vous parle sur ce point, nous ferons mieux de nous occuper d’affaires. Cependant il me semble voir apparaître l’image de votre père qui m’engage à continuer. — Comme il vous plaira, monsieur ; je ne chercherai pas à offrir d’autre garantie à celui qui doute de ma parole. — Eh bien ! milord, j’ai appris que dans le sanctuaire de White-Friars, asile si indigne d’un jeune homme de votre rang, un meurtre avait été commis. — Et vous m’accusez d’en être l’auteur, probablement ? — Dieu m’en préserve ! milord. Une enquête a été faite par le magistrat, dans laquelle il est rapporté que Votre Seigneurie, sous le nom supposé de Grahame, s’est comportée avec la plus grande bravoure. — Pas de compliment, je vous prie : je dois seulement me trouver fort heureux qu’on ne m’accuse pas encore d’avoir assassiné le vieillard. — C’est vrai, milord ; mais cette affaire même a besoin d’explication. Votre Seigneurie s’est embarquée ce matin-là avec une femme, et, dit-on, une immense somme d’argent en espèces et autres valeurs ; mais depuis on n’a pas entendu parler de cette femme. — Je me suis séparé d’elle au quai Saint-Paul, où elle est descendue avec son trésor. Je lui avais donné une lettre pour ce même John Christie. — Oui, c’est là l’histoire du batelier ; mais John Christie nie se souvenir de rien de cela. — Je suis fâché de ce que vous m’apprenez : fasse le ciel qu’elle n’ait pas été attirée dans un piège à cause du trésor qu’elle avait avec elle ! — J’espère que non, milord ; mais cela excite beaucoup d’inquiétude dans le public, et notre caractère national souffre de tous côtés. On se rappelle la fatale histoire de lord Sanquhar, pendu pour l’assassinat d’un maître d’armes, et