Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/358

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de mon chemin de l’une et l’autre manière ; mais il est juste du moins de vous en laisser le choix. — Mon choix est fait, dit Nigel : je vous ai dit par trois fois que ma volonté était de descendre à Greenwich. — Écrivez-moi sur un morceau de papier, dit le batelier, que telle est votre volonté positive. Il faut que j’aie quelque chose à montrer à ceux qui m’emploient, pour les convaincre que si leurs ordres n’ont pas été exécutés, c’est votre faute et non la mienne. — Il me plaît de tenir pour le moment ce joujou entre les mains, dit lord Glenvarloch ; je vous écrirai votre décharge quand nous serons sur terre. — Je ne voudrais pas aller à terre avec vous pour cent pièces d’or, reprit le batelier… la fatalité vous a toujours poursuivi, excepté au jeu. Mais agissez avec justice à mon égard, et donnez-moi le certificat que je vous demande. Si vous craignez une trahison pendant que vous écrirez, vous pouvez prendre mes pistolets ; tenez, les voici. » Il présenta effectivement ses armes à Nigel, qui n’hésita plus à donner au batelier une attestation dans les termes suivants :

« Jack Green et son compagnon, conduisant la barque appelée le Joli-Corbeau, ont rempli fidèlement leur devoir à mon égard, en me débarquant à Greenwich par mon ordre exprès ; et malgré leur désir de me conduire à bord du Royal-Chardon, présentement à l’ancre à Gravesend. » Ayant écrit cette déclaration, qu’il signa des lettres initiales de son nom et de son titre, N. O. G., il demanda encore une fois au batelier, en la lui remettant, de lui apprendre le nom de ceux qui l’employaient.

« Monsieur, reprit Jack Green, j’ai respecté votre secret, ne cherchez pas à pénétrer le mien. Il ne vous serait nullement utile de savoir pourquoi je prends en ce moment tant de peine, et vous ne le saurez pas… D’ailleurs, si vous avez envie de vous battre, comme vous le disiez tout à l’heure, le plus tôt sera le mieux ; seulement vous pouvez être assuré que nous ne vous voulions pas de mal, et que s’il vous en arrive, ce sera parce que vous l’aurez cherché. » Comme il finissait de parler, ils touchèrent le bord, et Nigel sauta immédiatement à terre. Le batelier déposa sa petite malle sur le rivage, en lui disant qu’il ne manquerait pas de trouver des bras pour la lui porter où il voudrait.

« J’espère, mes enfants, que nous nous quittons bons amis ? » dit le jeune seigneur en leur offrant une pièce d’argent qui valait le double du paiement auquel les bateliers avaient droit.

« Nous nous quittons comme nous nous sommes rencontrés,