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CHAPITRE XXVI.

LA LETTRE DE RECOMMANDATION.


Accorde-nous, fleuve paisible, un voyage favorable ; nous ne venons pas troubler tes flots tranquilles par les accents bruyants du plaisir, ni réveiller les échos endormis de tes rives par les voix de la flûte et du cor ; nous cherchons seulement à glisser en silence sur ton vaste sein.
La double Noce.


Une lumière grise ou plutôt jaunâtre commençait à percer les brouillards épais de White-Friars, quand un petit coup frappé à la porte du malheureux avare vint annoncer à lord Glenvarloch l’arrivée des bateliers. Il trouva sur le seuil l’homme qu’il avait vu la veille, et un autre matelot.

« Allons, mon maître, » dit l’un d’eux à voix basse, mais d’un ton brusque et résolu, « le temps et la marée n’attendent personne — Ils ne m’attendront pas, dit lord Glenvarloch ; mais j’ai des effets à emporter. — Oui, oui, c’est cela, Jack ; il n’y a personne qui prenne une barque maintenant sans la charger comme une charrette à six chevaux. Lorsqu’on n’a pas besoin de charger toute la cargaison, on prend seulement un petit canot ; et que le diable l’emporte ! Allons, allons, où sont vos effets ? »

Un des hommes eut bientôt assez, du moins dans son opinion, de porter la malle de lord Glenvarloch et les autres accessoires. Chargé de ce fardeau, il s’achemina vers les marches du Temple. L’autre batelier, qui semblait être le patron, voulut prendre la cassette qui contenait le trésor de l’avare, mais, l’ayant soulevée, il la laissa retomber aussitôt en s’écriant avec un gros juron : « Qu’il était aussi raisonnable d’attendre d’un homme qu’il portât Saint-Paul sur son dos. » La fille Traphois, qui, enveloppée d’un manteau de couleur sombre, et la tête couverte d’un grand capuchon, venait de les rejoindre, dit à lord Glenvarloch : « Qu’ils la laissent s’ils veulent… qu’ils laissent tout, pourvu que nous puissions fuir de cet horrible lieu. »

Nous avons déjà dit quelque part que Nigel avait la force d’un athlète : animé par un sentiment puissant de pitié et d’indignation, il montra d’une manière remarquable sa force physique, en saisissant le pesant coffre-fort au moyen de la corde qu’il avait mise à l’entour, et en le jetant sur son épaule. Chargé de ce poids, sous lequel auraient plié trois jeunes gens de notre siècle dégé-