Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/264

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trouve au-delà du tombeau qui doive durer à jamais… — Vous m’avez justement reprise, madame, » dit Marguerite avec calme ; « en parlant de l’état actuel de mon cœur, j’aurais dû me borner à dire qu’il durerait toute ma vie, qui, à la vérité, peut être courte. — Et qu’y a-t-il donc dans ce jeune lord écossais qui ait tant frappé votre imagination ? dit la dame. Je conviens qu’il est d’un physique agréable ; je l’ai vu, et je veux supposer qu’il soit aimable et poli ; mais quels sont ses talents, ses vertus ? car il faut qu’il en possède d’extraordinaires.

— Il est malheureux, bien malheureux, madame, et entouré de toutes sortes de pièges combinés méchamment pour lui faire perdre sa réputation, sa fortune et peut-être sa vie. Ces complots ont été formés dans l’origine par l’avarice ; mais maintenant ils sont suivis par l’ambition et la vengeance, animées par le génie du mal lui-même ; car lord Dalgarno… — Monna Paulal… Monna Paula !… » s’écria lady Hermione en interrompant la narration de sa jeune amie… « Elle ne m’entend pas, » dit-elle en se levant pour sortir ; « il faut que j’aille lui parler, je vais revenir à l’instant. » Elle revint effectivement un moment après. « Vous avez prononcé un nom, » dit-elle en rentrant, « que j’avais cru m’être familier ; mais Monna Paula m’a prouvé que je me trompais ; je ne connais pas ce lord… comment l’appelez-vous ? — Lord Dalgarno, répondit Marguerite ; c’est le plus méchant homme qui soit au monde. Sous le prétexte de l’amitié, il a introduit lord Glenvarloch dans une maison de jeu, espérant l’entraîner à sa perte ; mais celui-ci était trop vertueux, trop modéré, trop prudent, pour se laisser prendre à un piège si grossier. Qu’a fait alors lord Dalgarno ? il a cherché à décréditer cette modération en répandant le bruit que, ne voulant pas devenir la proie des loups, lord Glenvarloch s’était mis de leur côté pour avoir sa part du butin. En même temps que le perfide minait ainsi la réputation de son trop confiant compatriote, il avait soin de l’entourer de ses propres créatures et de l’empêcher de paraître à la cour. Depuis la conspiration des poudres, y eut-il jamais un complot plus profondément tramé et exécuté avec plus de lâcheté et de perfidie ! »

La dame sourit tristement de la véhémence de Marguerite ; mais elle soupira le moment d’après, en disant à sa jeune amie qu’elle devait connaître bien peu le monde où elle allait vivre, puisqu’elle témoignait une si grande surprise d’y trouver tant de scélératesse.