Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/199

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l’occasion de plaider votre cause, quand l’occasion s’en présentera. — Je n’ai pas de cause à plaider devant le duc, » dit Nigel d’un air grave ; « je vous ai répété cela plusieurs fois. — Mon Dieu ! reprit lord Dalgarno, j’entendais seulement par cette phrase qui vous porte ombrage, soupçonneux mortel que vous êtes, que je plaiderais votre cause auprès du duc comme je plaide la cause du duc devant vous. Assurément je puis bien réclamer ma part de la bénédiction favorite du roi notre maître : Beati pacifici[1]. »

À différentes reprises, les conversations qu’eut lord Glenvarloch avec le vieux comte et son fils prirent une semblable tournure, et eurent une pareille conclusion. Il sentait quelquefois vaguement que, soutenu par l’un et par l’autre, sans parler de l’influence plus secrète mais non moins réelle de lady Blackchester, son affaire, simple comme elle l’était devenue, aurait dû aller plus vite ; mais il était aussi impossible de douter de la brusque et franche probité du père que de l’amitié ardente et zélée de lord Dalgarno. Il ne pouvait guère soupçonner davantage que l’appui de la belle dame, qui le recevait avec tant de distinction, vînt à lui manquer, s’il arrivait qu’il en eût besoin. D’ailleurs Nigel sentait la vérité d’une observation que lord Dalgarno lui faisait souvent : c’est que le favori étant regardé comme son ennemi, tout employé subalterne dans les mains duquel son affaire devait passer chercherait à se faire un mérite de lui susciter des obstacles qu’il ne pourrait surmonter que par la patience et la fermeté, à moins qu’il ne préférât en venir à une réconciliation, ou, comme le disait lord Dalgarno, faire sa paix avec le duc de Buckingham. Nigel aurait pu, dans cette circonstance, avoir recours aux bons avis de son ami George Heriot ; ce qu’il n’aurait certainement pas manqué de faire, s’en étant si bien trouvé dans une première occasion : mais la seule fois qu’il vit le digne orfèvre, après sa présentation à la cour, il le trouva occupé à faire en toute hâte les préparatifs de son départ pour Paris, où l’appelaient une affaire de la plus grande importance concernant son état, ainsi que des ordres qu’il avait reçus du roi et du duc de Buckingham, et dont il pouvait résulter pour lui un profit considérable. Le brave homme sourit en nommant le duc de Buckingham. « Il était presque sûr d’avance, dit-il, que sa disgrâce de ce côté ne serait pas de longue durée. »

  1. Heureux les pacifiques. a. m.