Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’un automate qui obéit soudainement à l’impulsion d’un ressort. Mais ce qu’il y a d’étrange, c’est que ni la hâte avec laquelle il s’était rendu aux ordres de son patron, dont le message lui annonçait une affaire de la plus grande importance, ni même la posture dans laquelle, par pure humilité, il avait tenu sa tête courbée vers la terre depuis le moment où il avait mis le pied sur les domaines du comte de Huntinglen, n’avaient pu colorer ses joues de la plus faible rougeur. La rapidité de sa marche et la fatigue avaient couvert son front de grosses gouttes ; mais son teint était aussi pâle, aussi couleur de suif que jamais… et ce qui parut plus extraordinaire encore, quand il releva la tête, ses cheveux même pendaient de chaque côté de ses joues aussi plats, aussi lisses, en un mot dans le même état où ils étaient quand nous le présentâmes pour la première fois au lecteur, paisiblement assis devant son humble bureau.

Lord Dalgarno ne put étouffer complètement un éclat de rire en voyant cette ridicule figure puritaine venir se présenter à la compagnie comme une anatomie vivante, et même il dit tout bas à l’oreille de lord Glenvarloch ces vers :


Le diable te confonde, ami,
Avec ton visage à la crème !
Où donc as-tu pris cet air blême ?

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Nigel était trop peu familiarisé avec le théâtre anglais pour entendre une citation déjà connue à Londres au point de servir fréquemment d’allusion. Lord Dalgarno vit qu’il n’était pas compris, et il ajouta… « Cet homme, d’après son visage, doit être un saint ou le plus hypocrite coquin qui soit au monde ; et j’ai une si excellente opinion de la nature humaine, que je soupçonne toujours le pis. Voulez-vous faire un tour avec moi dans le jardin, milord, ou bien voulez-vous continuer de faire partie de ce grave conciliabule ? — Je vous accompagnerai très-volontiers, milord, » dit Nigel ; et en conséquence ils allaient s’éloigner lorsque George Heriot, qui tenait aux formes comme tous les gens de sa condition, observa que comme l’affaire qui les occupait regardait lord Glenvarloch, celui-ci ferait mieux de rester pour en être témoin, et la connaître à fond.

« Ma présence est tout à fait inutile, reprit le jeune lord : quand je resterais là, mon ignorance des affaires est telle que je ne pourrais que vous déranger sans m’en instruire davantage. Je