Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/70

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propriétaires ne sont pas accoutumés à donner comme nous une hospitalité sans bornes, je ne leur en suis que plus obligé pour avoir manqué à leurs usages en ma faveur, et m’avoir ouvert leur porte. — C’est là un brave garçon, » dit mistress Baby, dont les idées superstitieuses avaient été éveillées par les menaces de la prétendue sorcière, et qui, malgré son caractère violent, petit et égoïste, avait quelques étincelles de sentiments plus élevés qui la faisaient sympathiser aux généreuses dispositions, quoiqu’elle trouvât trop coûteux de les entretenir à ses frais ; « c’est là un brave garçon, répéta-t-elle, et digne de dix oies, si j’avais pu les lui faire bouillir ou rôtir. Je parierais qu’il est fils d’un gentilhomme et non d’un vilain. — Écoutez-moi, jeune Mordaunt, reprit Norna, et quittez cette maison. Le destin a de hautes vues sur vous… Vous ne resterez pas dans ce taudis pour être broyé parmi ses indignes ruines, avec les restes de ses indignes habitants ; créatures dont la vie importe aussi peu au monde que la végétation de la mousse qui croît à présent sur leur toit de chaume, et qui sera bientôt pilée avec leurs membres déchirés. — Je… je… je… vais partir, » dit Yellowley, qui, en dépit de ses prétentions à la science et à la sagesse, commençait à redouter le dénoûment de cette aventure ; car la maison était vieille, et les murs craquaient effroyablement à chaque coup de vent.

« Et pourquoi ? lui demanda sa sœur ; je n’imagine pas que le prince des puissances de l’air ait assez de pouvoir sur les êtres qui sont créés à l’image de Dieu pour qu’une bonne maison tombe sur nos têtes, parce qu’une méchante babillarde… » ici elle lança un regard furieux à la pythonisse… « est venue nous assourdir de ses clameurs, comme si nous étions autant de chiens obligés de ramper sous ses ordres. — Je désirais seulement, » dit Triptolème, honteux de son mouvement, « voir le champ d’orge qui doit avoir bien souffert de l’orage ; mais si cette honnête femme consent à rester avec nous, je pense que nous ferions mieux de nous asseoir tous en bonne intelligence, et d’attendre que le beau temps revienne. — Honnête femme ! répéta Baby… voleuse de profession, bien plutôt… » Puis, s’adressant directement à Norna : « Méchante créature, vieille folle que tu es, dit-elle, sors d’une honnête maison, ou honte à moi si je ne te brise point le crâne ! »

Norna lui répondit par un regard de profond mépris ; puis s’approchant de la croisée elle parut sérieusement occupée à considérer le ciel, tandis que la vieille domestique, Tronda, tirant sa