Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/428

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il la lui serra si cordialement qu’il le fit hurler et se secouer le poing, comme un chien à qui un charbon rouge tombe sur la patte.

Laissant le pirate retourner à bord de son vaisseau, nous resterons avec la famille de Magnus, réunie chez son parent au château de Stennis, où l’on se tenait sans cesse en garde contre toute surprise, sans interrompre un seul instant la vigilance.

Mordaunt Mertoun avait été accueilli avec beaucoup d’amitié par Magnus Troil lorsqu’il était venu à son secours avec un petit détachement des affidés de Norna, placés par elle sous ses ordres. L’udaller n’eut pas de peine à se convaincre que les mauvais bruits qui étaient parvenus à son oreille en sortant de la bouche du colporteur, jaloux de reporter sur son excellente pratique Cleveland toutes les bonnes grâces dont jouissait d’abord Mertoun à Burgh-Westra, étaient sans le moindre fondement. Ils avaient bien été confirmés par la bonne lady Glowrowrum et par la rumeur publique ; et ces deux autorités prenaient plaisir à représenter le jeune Mertoun comme assez impudent pour prétendre à la main de l’une ou de l’autre sœur, et, comme un sultan, hésitant seulement à laquelle il jetterait le mouchoir. Mais Magnus n’ignorait pas que la renommée mentait souvent ; et il était parfois disposé, quand il s’agissait de scandale, à regarder la bonne lady Glowrowrum comme presque aussi digne de foi que la renommée. Il se hâta donc de rendre toute sa faveur à Mordaunt ; il apprit avec beaucoup de surprise l’histoire des droits que Norna prétendait avoir sur ce jeune homme, et avec non moins d’intérêt, l’intention où elle était de lui donner la fortune considérable dont elle avait hérité. On peut même croire, quoiqu’il ne répondît pas précisément à quelques mots qu’elle laissa échapper sur une union entre son héritier et l’aînée des deux sœurs, qu’il regardait une telle alliance comme désirable, tant à cause du mérite personnel du jeune homme que de l’occasion qui s’offrait de réunir la magnifique propriété qui avait été partagée entre son propre père et celui de Norna. À tout événement, l’udaller accueillit son jeune ami avec une véritable tendresse, et de concert avec le propriétaire de la maison, il chargea Mertoun, comme le plus jeune et le plus actif des hommes d’armes, du soin de commander la garde durant la nuit et de relever les sentinelles aux environs du château de Stennis.