Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/409

Cette page a été validée par deux contributeurs.

soit dans une barque, soit sur un bidet, et peut-être sur un manche à balai ; on a aussi vu son drow muet aller et venir, et jouer de tous côtés le rôle d’espion, et c’est un fameux espion ; car il peut tout entendre et ne peut rien dire à personne, sinon à sa maîtresse. Et nous savons en outre qu’elle peut entrer dans l’église lorsque toutes les portes en sont fermées, car on l’y a vue plus d’une fois, Dieu nous sauve des griffes du démon ! Ainsi, sans vous faire plus de questions, je conclus que c’est la vieille Norna que vous avez laissée dans l’église avec ce coquin de pirate ; les rattrape qui pourra. Je ne puis m’empêcher de dire cependant, ma jolie miss Minna, que vous autres Shetlandais vous paraissez oublier également les lois humaines et l’Évangile, lorsque vous recourez à des tours de sorcellerie pour tirer des coupables de la prison publique. Le moins que vous, votre cousine ou votre père puissiez faire, c’est d’employer toute votre influence pour faire décamper ce mauvais drôle le plus tôt possible, sans qu’il nuise à notre ville ni au commerce, et alors il n’y aura pas grand mal à tout ce qui est arrivé. Dieu m’est témoin que je n’en voulais pas à la vie de ce pauvre garçon, pourvu que je pusse le laisser aller sans encourir de blâme ; et je souhaitais moins encore que sa détention attirât le moindre mal au digne Magnus Troil de Burgh-Westra. — Je vois où le soulier vous blesse, monsieur le prévôt, dit Claude Halcro, et je crois pouvoir répondre pour mon ami M. Troil, aussi bien que pour moi-même, que nous ferons et dirons tout ce qui sera en notre pouvoir pour forcer ce Cleveland à quitter tout de suite ces parages. — Et moi, dit Minna, je suis tellement convaincue que vous conseillez là le meilleur des partis à prendre, que ma sœur et moi nous irons demain dès la pointe du jour au château de Stennis, si M. Halcro veut bien nous accompagner, pour recevoir mon père à son débarquement, afin que nous lui communiquions votre désir, et que nous usions de toute notre influence pour persuader à ce malheureux homme de quitter le pays. »

Le prévôt Torfe la regarda avec quelque surprise. « Il n’est pas beaucoup de jeunes filles, dit-il, qui oseraient approcher à plus de huit milles d’une bande de pirates. — Nous ne courons aucun risque, » dit Claude Halcro en l’interrompant. « Le château de Stennis est fort, et mon cousin à qui il appartient ne manque ni d’armes ni de soldats… ces demoiselles y seront en sûreté aussi bien qu’à Kirkwall, et une prompte communication entre Magnus Troil et ses filles peut beaucoup améliorer les affaires, et je suis