Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/39

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la société d’aucune autre personne, il fallait donc retourner près de lui sans perdre de temps. Quant à la venue de son père à Burdh-Westra, « on pouvait aussi bien, dit-il, s’attendre à voir arriver le cap Sumburgh lui-même. — Ce serait un hôte embarrassant, répliqua Magnus ; mais vous resterez à dîner aujourd’hui ; nous avons les familles de Muness, de Quendale, de Therlivoe, et je ne sais quelle autre encore. Outre les trente personnes que nous avons eues à coucher cette bienheureuse nuit, nous en coucherons ce soir autant que les chambres, les granges, les greniers et les hangars pourront fournir de lits et de paille d’orge ; et vous laisseriez derrière vous une pareille partie ! — Et la joyeuse danse du soir, » ajouta Brenda d’un ton de reproche et de regret, » et les jeunes gens de l’île de Paba qui doivent danser la danse des épées ! qui prendrons-nous pour leur tenir tête en l’honneur de Main-Isle ? — Il y aurait encore dans ces environs plus d’un joyeux danseur, Brenda, répondit Mordaunt, quand bien même je ne devrais plus sauter de ma vie ; et tant qu’il y aura de bons danseurs, Brenda Troil aura toujours le meilleur cavalier. Il faut que je saute cette nuit, moi, à travers les marais de Dunrossness. — N’y songez pas, Mordaunt, » dit à son tour Minna, qui, pendant cette conversation, avait regardé par la fenêtre avec une espèce d’inquiétude ; « ne traversez pas aujourd’hui les marais de Dunrossness. — Et pourquoi pas aujourd’hui, Minna, aussi bien que demain ? » demanda Mordaunt en riant.

« Ah ! c’est que le brouillard de la mer pèse encore sur cette chaîne d’îles, et ne nous a pas permis d’apercevoir une seule fois depuis le lever du jour, le Fitful-Head, ce cap majestueux qui termine cette magnifique rangée de montagnes. Les oiseaux de mer se hâtent de regagner la côte, et le canard semble au milieu du brouillard aussi grand que le courlis. Voyez comme les plongeons mêmes et les mouettes fuient vers les rochers du rivage pour s’y abriter. — Et cependant elles se moquent d’une bouffée de vent, aussi bien qu’une frégate du roi, ajouta le père ; c’est mauvais signe quand elles tourbillonnent et s’enfuient. — Restez donc avec nous, reprit Minna ; la tempête menace d’être terrible : ce sera un beau spectacle à voir de Burgh-Westra, si nous n’avons point d’ami exposé à sa fureur. Voyez, l’air est épais et lourd, quoique la saison soit peu avancée, et le vent si calme que pas un brin d’herbe ne remue sur la bruyère. Restez avec nous, Mordaunt ; la tempête que ces signes annoncent sera épouvantable. — Je n’en partirai que plus