Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/200

Cette page a été validée par deux contributeurs.

accablent avec leurs douanes et droits du roi ! C’est le rôle d’un honnête homme que de résister à ces exactions. Je l’ai fait toute ma vie, et toute ma vie je le ferai. »

Il y eut une longue et bruyante salve d’applaudissements, parmi les convives qui approuvaient plus volontiers les principes commodes de Magnus au sujet des revenus publics, que la rigueur de ses décisions concernant les débris que la mer envoyait sur les côtes. Ces sentiments étaient naturels chez des insulaires vivant dans une contrée isolée et soumis à des vexations arbitraires. Mais l’inexpérience de Minna l’entraîna bien plus loin que son père, et elle dit tout bas à Brenda, non sans être entendue de Cleveland, que la pusillanimité des Orcadiens n’avait su profiter d’aucune des occasions que leur avaient présentées les derniers événements pour s’affranchir du joug écossais.

« Pourquoi, ajouta-t-elle, n’avons-nous pas, au milieu de si nombreuses révolutions, saisi l’instant favorable pour nous soustraire à une obéissance illégitime, et pour revenir à la protection du Danemarck, pays de nos ancêtres ? Pourquoi hésitons-nous encore à le faire, si ce n’est que les habitants des Orcades ont contracté toutes sortes d’alliances avec nos oppresseurs, qu’ils sont devenus sourds à la voix de l’héroïque sang norse qu’ils tenaient de leurs ancêtres ! »

La dernière partie de ce discours patriotique arriva jusqu’aux oreilles étonnées de notre ami Triptolème, qui, sincèrement dévoué à la succession protestante et à la révolution établie, ne put s’empêcher de s’écrier : « Comme chante le vieux coq le jeune coq apprend à chanter ; je devrais dire la jeune poule… Je vous demande pardon, miss, si j’ai dit quelque chose d’inconvenant dans un genre ou un autre… C’est un heureux pays que celui où le père déclame contre les douanes royales, et la fille contre la couronne du roi ! À mon jugement, cela ne peut finir que par des arbres et du chanvre. — Les arbres sont rares chez nous, dit Magnus ; et quant au chanvre, nous en avons besoin pour nos agrès, et nous ne pouvons le perdre en cravates. — Et quiconque, ajouta le capitaine, prend ombrage de ce que dit cette jeune dame, ferait beaucoup mieux d’employer ses oreilles et sa langue à une autre besogne. — Oui, oui, dit Triptolème ; ce n’est pas la peine de dire des vérités lorsqu’elles sont aussi mal venues auprès des esprits forts que de la luzerne mouillée devant une vache, et dans un pays où les hommes sont prêts à dégainer leurs sabres si une fillette regarde quelqu’un