Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/185

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autre convertie en sauce végétale pour du bœuf salé, par l’ignorance des bonnes ménagères écossaises à qui on les avait envoyées comme de rares présents.

Outre ces préparatifs, la table offrait encore toutes les généreuses boissons qui sont comprises par les bons vivants sous le nom facétieux « d’un poil du chien qui vous a mordu. » C’était du capiteux usquebaugh d’Irlande, de la vraie liqueur de Nantes, du véritable Shiedamm, l’eau-de-vie de Caithness et l’eau d’or de Hambourg ; c’était aussi du rhum d’une formidable antiquité, et les cordiaux des îles du Levant. Après cette énumération, il serait inutile de mentionner la forte ale brassée à la maison, le mum allemand et la bière de Schwartz, et il serait encore plus indigne de nous arrêter sur les innombrables espèces de potages et soupes destinés, avec le bland et diverses préparations de laitage, à ceux qui préféraient des aliments moins lourds.

Il n’était donc pas merveilleux que la vue d’une si bonne chère réveillât l’appétit et rallumât le courage des convives fatigués. Les jeunes gens se mirent en devoir de chercher leurs dames de la soirée précédente, et recommencèrent les petites causeries qui avaient si joyeusement fait passer la nuit, tandis que Magnus, avec tous ses vieux amis norses, encourageait de précepte et d’exemple les gens moins âgés ou plus sobres à faire raffle complète des bonnes choses qu’ils avaient devant eux. Cependant il y avait encore un long intervalle de temps à employer avant le dîner, car les déjeuners les plus longs ne peuvent durer au delà d’une heure ; et il était à craindre que Claude Halcro ne songeât à remplir cette matinée en chantant ses propres chansons ou en racontant dans toute sa longueur la formidable histoire de sa présentation au glorieux John Dryden. Mais la fortune épargna aux hôtes de Burgh-Westra un si grand malheur, en leur envoyant un amusement fort convenable à leurs goûts et à leurs habitudes.

Beaucoup de convives avaient déjà tiré leur cure-dent, et quelques uns commençaient à parler de ce qu’on pourrait faire, lorsque, la démarche précipitée et l’œil en feu, Éric Scambester, un harpon à la main, vint annoncer à la compagnie qu’il y avait une baleine sur la côte, à peu près vers l’embouchure du Woe ; alors vous auriez vu une joyeuse, bruyante et universelle agitation, comme l’amour d’un exercice étroitement lié à notre naturel peut seul en faire naître. Une bande de gentilshommes campagnards, allant chasser les premiers coqs de bruyère de la saison, serait une