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Gray firent leur première apparition aux Orcades, les vieillards reconnurent tout d’abord dans l’ode des Fatales Sœurs, les vers runiques qui avaient amusé ou effrayé leur enfance sous le titre de Magiciennes, et que les pêcheurs de North-Ronaldshaw, ou d’autres îles éloignées, avaient encore l’habitude de chanter, quand on leur demandait une chanson norse.

Moitié écoutant, moitié perdu dans ses propres réflexions, Mordaunt Mertoun se tenait debout à la porte de l’appartement, et assez rapproché du petit cercle formé autour du vieil Halcro, tandis que le barde chantait sur un air sauvage, lent et monotone, varié seulement par les efforts du chanteur pour donner de l’intérêt et de la vigueur à certains passages, l’imitation suivante d’un chant de guerre norse :


chant de harold harfager.
« L’astre du jour se lève et plus pâle et plus sombre ;
Plus calme et plus terrible a murmuré le vent ;
L’aigle, de son rocher, comme un éclair descend ;
Le loup de ses vallons quitte l’horreur et l’ombre ;
Le corbeau plane au sein des humides vapeurs ;
Dans la broussaille au loin le chien sauvage aboie :
De ces fins animaux que veulent les clameurs ?
Ils disent dans leurs sons que l’écho nous renvoie :
« Nous aurons un festin de morts et de mourants,
« D’Harold aux cheveux blonds les drapeaux sont flottants. »
« Plus d’un cimier dans l’air noblement se balance,
Plus d’un casque éblouit des flammes qu’il nous lance ;
Plus d’un bras a levé la hache des combats
Destinée à couper le bois dur de la lance.
Parmi les rangs tout prêts à donner le trépas,
Le fier coursier hennit, le bouclier résonne ;
Les chefs ont commandé, déjà le clairon sonne,
Le barde essaie un chant ou de gloire ou de mort :
Cavaliers, fantassins, votre valeur bouillonne,
La victoire est à vous : vous êtes Fils du Nord.
« Ni halte, ni sommeil, en plein jour et dans l’ombre ;
Ne comptez point vos coups, ni même votre nombre :
Moissonneurs, en avant, dans la plaine, au vallon
Voyez se déployer l’abondante moisson,
Éparse ou ramassée, et flexible ou puissante,
Toute prête à tomber sous la faucille errante ;
Récoltez la moisson des camps et de la mort :
En avant, cavaliers, fantassins, troupe ardente,
La moisson est à vous : vous êtes Fils du Nord,