Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/56

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mémoire ; mais il était probable que cette petite porte était fermée, et sa retraite devenait impossible de ce côté.

« Il faut pourtant essayer, se dit-il : le seul moyen de sauver cette malheureuse, cette jeune fille aimable autant qu’à plaindre, est un appel de son père aux lois de son pays… Il faut que je me hâte de lui apprendre cette nouvelle déchirante. »

Tout en se parlant ainsi à lui-même, Tressilian s’était approché pour voir s’il y avait quelque moyen d’ouvrir cette porte ou de l’escalader, quand il s’aperçut que du dehors on introduisait une clef dans la serrure. Cette clef tourna, la porte céda, et un cavalier, qui entrait enveloppé dans son manteau et coiffé d’un grand chapeau garni d’une plume tombante, se trouva tout-à-coup à quatre pas de celui qui cherchait à sortir. Tous deux s’écrièrent ensemble d’un ton de fureur et de surprise : « Varney ! Tressilian !… «

« Que faites-vous ici ? » Telle fut la question que l’étranger adressa d’un ton dur à Tressilian, quand le premier moment de surprise fut passé. « Que faites-vous ici où vous n’êtes ni attendu ni désiré ?

— Et vous, Varney, qu’y faites-vous, vous-même ? Venez-vous triompher de l’innocence que vous avez souillée, comme le vautour ou le corbeau s’abat sur l’agneau à qui il a arraché les yeux ? ou bien viens-tu affronter la juste vengeance d’un honnête homme outragé ? Tire ton épée, chien maudit, et défends-toi. »

En disant ces mots, Tressilian mit l’épée à la main ; mais Varney se contentant de porter la main sur la poignée de la sienne, répondit : « Tu es fou, Tressilian. J’avoue que les apparences sont contre moi ; mais, par tous les serments que peut inventer un prêtre, ou qu’un homme peut faire, je te jure que mistress Amy Robsart n’a pas été outragée par moi, et en vérité j’aurais quelque répugnance à en venir aux mains avec toi pour cette affaire… Tu sais que je suis homme à me battre.

— Je l’ai entendu dire, mais en ce moment j’aimerais à en avoir d’autres preuves que ta parole.

— Elles ne te manqueront point, si ma lame et sa poignée me sont fidèles, » répondit Varney. Puis, tirant son épée de la main droite, et rassemblant son manteau sur son bras gauche, il attaqua Tressilian avec une vigueur qui pour un moment sembla lui donner l’avantage du combat ; mais cet avantage ne dura pas long-temps. Tressilian unissait à la soif de la vengeance un coup d’œil qui le servait admirablement dans le maniement des armes ; de sorte que Varney, se trouvant à son tour serré de près, voulut profiter de la