Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/468

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— Dans la chambre de madame ; et songe qu’il faut qu’elle vienne avec nous : tu n’es pas homme à te laisser effrayer par des cris ?

— Non, quand on peut s’appuyer des paroles de l’Écriture ; et il est écrit : « Femmes, obéissez à vos maris… » Mais les ordres de milord nous autorisent-ils à employer la violence ?

— Bon ! dit Varney, voici son cachet. » Après avoir fait taire de cette manière les objections de son associé, ils se rendirent ensemble à l’appartement de lord Hunsdon, et donnant connaissance de leur dessein à la sentinelle comme ayant reçu la sanction de la reine et du comte de Leicester, ils entrèrent dans l’appartement de l’infortunée comtesse.

On peut concevoir quelle fut l’horreur d’Amy quand, éveillée en sursaut au milieu d’un sommeil agité, elle vit à côté de son lit ce Varney, l’homme qu’elle craignait et détestait le plus. Sa seule consolation fut de voir qu’il n’était pas seul, quoiqu’elle eût autant de raison de redouter son brutal compagnon.

« Madame, dit Varney, il n’y a pas de temps à perdre en cérémonies ; milord Leicester, ayant mûrement réfléchi aux difficultés du moment, vous envoie l’ordre de retourner immédiatement avec nous à Cumnor-Place. Regardez, voici sa bague, qui porte son sceau, comme gage de cet ordre immédiat et positif.

— C’est faux, dit la comtesse, tu lui as dérobé ce gage, toi qui es capable de toute espèce de scélératesse, depuis la plus basse jusqu’à la plus noire.

— Vous vous trompez, madame, répondit Varney ; cela est si vrai que, si vous ne vous levez pas à l’instant et ne vous préparez pas à nous suivre, nous devons vous forcer d’obéir à ces ordres.

— Me forcer ! tu n’oserais pas en venir à ce point, tout vil que tu es, s’écria la malheureuse comtesse.

— C’est ce qui reste à prouver, madame, » dit Varney, qui avait résolu de l’intimider, comme le seul moyen de vaincre sa résistance. « Si une fois vous me forcez à m’y mettre, vous trouverez en moi un rude valet-de-chambre. »

Ce fut à cette menace qu’Amy se mit à pousser des cris si effrayants que, sans l’opinion où l’on était qu’elle avait perdu l’esprit, elle aurait vu bientôt arriver lord Hunsdon et d’autres à son aide. S’apercevant cependant que ses cris étaient inutiles, elle en appela à Foster dans les termes les plus touchants, le conjurant, si l’honneur et l’innocence de sa fille Jeannette lui étaient chers, de ne pas souffrir qu’elle fût traitée avec cette brutale violence.