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gardes de la reine traversaient la grande allée du jardin. Ils purent entendre l’un d’eux dire : « Nous ne pourrons jamais les trouver ce soir, au milieu de toutes ces niches et de tous ces faux-fuyants ; mais si nous ne mettons pas la main dessus quand nous serons là-bas au bout, nous reviendrons monter la garde à la porte, et de cette manière nous les bloquerons jusqu’au matin.

— Voilà une belle affaire, dit un autre, de venir tirer l’épée aussi près de la personne de la reine, et comme qui dirait dans son propre palais ! Le ciel les confonde ! Il faut que ce soient de vieux coqs de combat qui, étant ivres, se seront sauté aux yeux. Il serait presque dommage de les trouver ; car ils courent risque d’avoir le poignet coupé, et il est dur de perdre une main pour avoir touché un morceau de fer dont il est si naturel de se servir.

— Tu es un querelleur toi-même, George, dit un autre ; mais prends garde à toi, car la loi est telle que tu le dis.

— Oui, dit le premier, à moins que la chose ne soit favorablement interprétée ; car tu sauras que ce palais n’est pas à la reine, mais à lord Leicester.

— Ma foi ! quant à cela, la peine pourrait être tout aussi sévère, dit l’autre ; car si notre gracieuse maîtresse, que Dieu protège, est reine, comme il est vrai qu’elle l’est, milord Leicester est autant qu’un roi.

— Chut donc, drôle ! dit un troisième ; qui sait si quelqu’un ne t’écoute pas ? » Ils passèrent leur chemin en continuant négligemment leurs recherches, mais plus occupés en effet de leur conversation que de découvrir les individus qui avaient causé ces troubles nocturnes.

Ils ne se furent pas plutôt avancés à quelque distance sur la terrasse, que Leicester, faisant signe à Tressilian, sortit furtivement avec lui de l’endroit où ils s’étaient cachés ; et, prenant un autre chemin, tous deux s’échappèrent par le portique sans être aperçus. Il conduisit Tressilian à la tour de Mervyn, où celui-ci était de nouveau logé, et avant de s’en séparer, il lui adressa ces paroles :

« Si tu as le courage de continuer et de mettre à fin la partie qui vient d’être ainsi interrompue, sois près de moi quand la cour sera réunie demain ; nous trouverons un moment, et je te ferai connaître par mon signal quand il sera favorable.

— Milord, dit Tressilian, dans toute autre circonstance j’aurais pu demander la cause de la haine étrange et invétérée qui vous anime contre moi : mais vous avez empreint sur mon épaule une