Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/279

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à un lâche comme toi sa scélératesse. Mais, va-t’en… va dire à ton maître, que, lorsque je suivrai la voie honteuse dans laquelle doivent nécessairement me conduire d’aussi indignes manèges que ceux que tu m’a conseillés en son nom, je lui donnerai un rival un peu plus digne de ce titre. Il ne sera pas supplanté par un vil laquais, dont le plus grand bonheur est de se parer du vêtement de son maître avant qu’il soit complètement usé, et qui ne peut tout au plus séduire qu’une fille de faubourg par l’élégance des rosettes neuves qu’il a fait mettre aux vieilles pantoufles de son maître. Sortez d’ici, monsieur ; sortez !… Je te méprise tant, que je suis honteuse de m’être mise en colère contre toi. »

Varney quitta la chambre avec une expression de rage concentrée ; il fut suivi de Foster, dont l’esprit naturellement lent à émouvoir fut bouleversé par cette violente explosion d’indignation, qui, pour la première fois, avait saisi une personne qui lui avait paru jusqu’alors trop indolente et trop douce pour nourrir aucune pensée de colère, ou proférer aucune parole emportée. Foster suivit donc Varney pas à pas, le persécutant de questions auxquelles celui-ci ne répondit rien, jusqu’à ce qu’ils fussent arrivés dans l’aile opposée du bâtiment, et dans la vieille bibliothèque avec laquelle le lecteur a déjà pu faire connaissance. Là, Varney se tourna vers l’inexorable Foster, et lui adressa la parole d’un ton assez calme ; car ce court instant avait suffi pour rendre la présence d’esprit à un homme aussi habitué à commander à ses passions.

« Tony, » dit-il avec le rire moqueur qui lui était familier, « il ne sert de rien de le nier : la femme et le diable qui, comme ton oracle, M. Holdforth, pourra te le confirmer, trompèrent l’homme au commencement du monde, se sont trouvés aujourd’hui plus forts que ma sagesse. Cette petite sorcière avait quelque chose de si séduisant ; elle a si bien gardé son sang-froid pendant que je lui communiquais ce message de milord, que, sur ma foi, j’ai cru que je pouvais parler un peu pour mon compte. Elle croit maintenant me tenir la tête sous sa ceinture, mais elle se trompe grossièrement… Où est le docteur Alasco ?

— Dans son laboratoire, répondit Foster ; c’est l’heure où on ne peut lui parler. Nous devons attendre que midi soit passé, ou bien nous troublerions ses importantes… que dis-je, importantes !… ses divines études.

— Oui, il étudie la divinité du diable, dit Varney ; mais j’ai be-