Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/150

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à la mine aussi honnête qui avaient assez d’art pour le faire. »

Il introduisit alors Tressilian dans une salle basse, et alla voir dans quel état était son maître, de peur que le retour inattendu de son pupille chéri, de son fils adoptif, ne l’affectât trop vivement. Il revint bientôt après, et dit que sir Hugh était assoupi dans son fauteuil, et que, aussitôt qu’il serait éveillé, M. Mumblazen le ferait savoir à M. Tressilian.

« Mais ce sera un grand hasard s’il vous reconnaît, dit l’écuyer, car il a oublié les noms de tous les chiens de sa meute. Je crus, il y a environ une semaine, qu’il allait se mieux porter ; « Vous me sellerez demain le vieux Sorrel, » me dit-il tout-à-coup, après avoir bu son coup du soir dans un grand gobelet d’argent, « et vous mènerez les chiens sur la colline de Hazelhurtz. » Nous étions tous joyeux et nous sortîmes avec lui de bon matin. Il entra en chasse comme à l’ordinaire ; mais il ne dit pas un mot, si ce n’est que le vent était du sud et que la piste tiendrait. Puis, avant qu’on eût découplé les chiens, il se mit à regarder autour de lui, comme un homme qui s’éveille au milieu d’un rêve, tourna bride et reprit la route du château, nous laissant les maîtres de chasser, pour notre compte, si cela nous convenait.

— Voilà un triste récit, Will, reprit Tressilian, mais Dieu nous assistera, puisque l’homme n’y peut rien.

— Vous ne nous apportez donc pas de nouvelles de notre jeune maîtresse ? Mais qu’ai-je besoin de vous questionner ? votre figure en dit assez. J’avais toujours espéré que si quelqu’un pouvait trouver sa piste, ce serait vous. Tout est donc fini ! Mais si jamais ce Varney se trouve à portée de mon arbalète, je lui enverrai une flèche qui ne le manquera pas ; j’en jure par le pain et le sel. »

Comme il parlait, la porte s’ouvrit et M. Mumblazen parut. C’était un vieux gentilhomme, maigre, dont les joues ridées ressemblaient à des pommes qui ont passé l’hiver ; ses cheveux gris étaient cachés en partie sous un petit bonnet à forme élevée et conique, semblable aux paniers de fraises que les fruitiers de Londres étalent devant leurs boutiques. Il était trop sentencieux pour dépenser beaucoup de paroles à saluer quelqu’un ; il se contenta donc d’accueillir Tressilian par un signe de tête et un serrement de main, et l’invita à le suivre dans la grande chambre de sir Hugh, où se tenait habituellement le vieux chevalier. Will Badger les accompagna sans qu’on le lui dît, curieux de voir si l’arrivée de Tressilian ferait sortir son maître de son état d’apathie.