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allaient et venaient avec toute la bruyante insolence des gens de leur profession. On entendait les hennissements des chevaux et les aboiements des chiens ; car milord, en venant inspecter le château, s’était naturellement muni de tout ce dont il avait besoin pour chasser dans un parc qui passait pour avoir été le premier, de toute l’Angleterre, qu’on eût enclos de murs, et qui était pourvu de bêtes fauves dont le repos n’avait pas été troublé depuis longtemps. Un grand nombre d’habitants du village, espérant un heureux résultat de cette visite extraordinaire, rôdaient autour de la cour et attendaient la sortie du haut et puissant seigneur. Leur attention fut excitée par l’arrivée précipitée de Varney : — C’est l’écuyer du comte, — se dirent-ils entre eux, tandis qu’ils cherchaient à mériter ses bonnes grâces par leur empressement à ôter leur bonnet et en s’avançant pour tenir la bride et l’étrier au favori de Sa Seigneurie ainsi qu’à son compagnon.

« Éloignez-vous un peu, messieurs, dit Varney avec hauteur, et laissez les domestiques remplir leurs fonctions. »

Les paysans mortifiés se retirèrent aussitôt, tandis que Lambourne, attentif à imiter les airs de son supérieur, éloignait plus durement encore ceux qui lui offraient leurs services. « Retire-toi, paysan, va-t’en au diable, et laisse ces coquins de valets faire leur devoir.

Tandis qu’ils donnaient leurs chevaux aux domestiques et qu’ils s’avançaient vers le château avec un air de supériorité qu’une longue habitude et la conscience de sa noblesse rendaient naturel à Varney, et que Lambourne cherchait à imiter de son mieux, les pauvres habitants de Woodstock se disaient tout bas les uns aux autres : « Que Dieu nous délivre de ces insolents valets ! Si le maître leur ressemble, le diable peut les emporter tous, et il n’aura que ce qui lui est dû.

— Silence, mes bons voisins ! dit le bailli, retenez votre langue entre vos dents… nous en saurons davantage tout à l’heure… Mais jamais lord ne sera aussi bien accueilli à Woodstock que le fut le vieux roi Henri, tout fier qu’il était ; si de sa royale main il administrait quelques coups de fouet à un homme, il lui jetait ensuite à la face une poignée de pièces d’argent à son effigie, pour servir de baume au mal qu’il lui avait fait.

— Que la paix soit avec lui ! dit l’auditoire ; il se passera du temps avant que la reine Élisabeth nous donne des coups de fouet.

— C’est ce dont il ne faut pas juger, reprit le bailli. Patience,