Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/433

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— Oh ! ne me quittez pas, mes amis, s’écria la reine ; Roland et Seyton, ne me quittez pas ; il y a bien assez de bras qui frapperont dans cette affreuse bataille ; ne me retirez pas ceux sur qui je me fie pour ma sûreté.

— Nous ne pouvons quitter Sa Majesté, » dit Roland en regardant Seyton et ramenant son cheval.

« Je n’en attendais pas davantage de toi, » répondit l’orgueilleux jeune homme.

Roland ne fit point de réponse, mais se mordit les lèvres jusqu’à ce que le sang y vînt, et piquant son cheval, il le dirigea vers le palefroi de Catherine, à laquelle il dit à voix basse : « Je n’ai jamais pensé avoir rien fait pour vous mériter ; mais aujourd’hui, je me suis entendu accuser de poltronnerie, et mon épée est restée dans son fourreau, et tout cela à cause de vous.

— Il y a de la folie parmi nous tous, dit la demoiselle ; mon père, mon frère et vous, Roland, vous êtes tous privés de votre raison… Nous ne devrions penser qu’à la pauvre reine, et nous nous laissons inspirer par nos absurdes jalousies… Le moine est le seul soldat et le seul homme de bon sens parmi vous tous… Monseigneur abbé, » s’écria-t-elle à haute voix, « ne serait-il pas mieux que nous nous retirassions à l’ouest, pour y attendre l’événement que Dieu nous enverra, au lieu de rester ici sur la grande route ? la reine est exposée et embarrasse les troupes dans leur marche.

— Vous avez raison, ma fille, répondit l’abbé ; si nous avions seulement quelqu’un pour nous guider dans un lieu où la personne de la reine pût être en sûreté… Nos nobles gentilshommes volent au combat sans penser à la cause de la guerre.

— Suivez-moi, » dit un chevalier ou un homme d’armes bien monté, complètement couvert d’une armure noire, ayant la visière de son casque baissée, et ne portant ni cimier à son casque, ni devise sur son bouclier.

« Nous ne suivrons point un étranger, répliqua l’abbé, sans quelque garantie de sa foi,

— Cet étranger se remet entre vos mains, dit le cavalier ; si vous désirez en savoir davantage sur moi, la reine sera ma caution. »

Depuis le commencement de l’action, Marie était restée fixée à la même place, comme si la crainte eût absorbé toutes ses facultés ; cependant elle souriait machinalement, saluait et faisait signe de la main chaque fois que des bannières se baissaient devant elle, et que les bataillons la saluaient de leurs lances à mesure qu’ils