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dame d’honneur, jeta le paquet de la reine dans la barque, et traversa le jardin avec la rapidité silencieuse de l’aile d’un oiseau qui plane dans les airs.

« Par le ciel ! c’est un traître, dit Seyton, je l’ai toujours craint.

— Il ne l’est pas, répondit Catherine : il est aussi pur que le ciel qui s’étend sur nos têtes.

— Silence, mignonne, dit son frère, par pudeur si ce n’est par crainte. Camarades, partez et ramez ; il y va de votre vie !

— Emmenez-moi, emmenez-moi, » dit lady Fleming d’une voix plus haute que la prudence ne le permettait. En effet, cette dame était restée sur le rivage.

« Partez, partez ! répéta Henri Seyton ; abandonnons tout, pourvu que nous sauvions la reine !

— Le souffrirez-vous ? madame, » dit Catherine d’un ton suppliant ; « laisserez-vous ainsi votre libérateur exposé à la mort.

— Je ne le souffrirai point, répondit la reine : Seyton, je vous ordonne d’attendre, quoi qu’il en arrive.

— Pardon, madame, si je vous désobéis, » dit l’obstiné jeune homme ; et d’une main enlevant lady Fleming, il commença lui-même à pousser la barque.

Elle était à peine à deux toises du bord, et les rameurs la faisaient déjà virer, quand Roland Græme, arrivant, s’élança du rivage et parvint dans la barque renversant Seyton, sur lequel il tomba. Le jeune homme jura, mais se retint, et, arrêtant Græme qui allait vers la poupe, dit : « Votre place n’est point avec de nobles dames, restez à la proue. Maintenant, partez, partez, ramez, pour Dieu et pour la reine ! »

Les rameurs obéirent, et commencèrent à ramer vigoureusement.

« Pourquoi n’avez-vous pas enveloppé les rames ? dit Roland Græme ; les coups réveilleront la sentinelle ; ramez ; camarades, et mettez-vous hors de la portée de la balle ; car si le vieil Hildebrand, le gardien, n’a pas soupé avec un potage de pavois, ce bruit devra l’éveiller.

— Ton retard est cause de tout ceci, dit Seyton ; mais dans peu c’est à moi que tu en rendras compte ainsi que d’autres choses. »

La crainte de Roland fut trop tôt réalisée pour qu’il pût se permettre de répondre. La sentinelle, dont le sommeil avait résisté au murmure des voix, fut alarmée du bruit des rames. Son cri fut aussitôt entendu. « Une barque ! une barque ! abordez, ou je fais