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connue, trouva facilement un cheval, grâce à l’autorité du chambellan ; et comme les routes n’étaient pas des plus sûres, il résolut de profiter de la compagnie du voiturier Auchtermuchty, qui partait pour Édimbourg.

Le digne voiturier, suivant la coutume de tous les rouliers, conducteurs de diligences, et autres personnes de pareille condition, depuis les temps les plus reculés jusqu’à ce jour, ne manquait jamais de bonnes raisons pour s’arrêter sur la route aussi souvent que bon lui semblait ; et le lieu le plus attrayant pour lui était un relai peu éloigné d’un vallon romantique bien connu sous le nom de Keirie-Craigs. Les environs de ce lieu pittoresque possèdent encore un charme bien différent de celui qui arrêtait la marche d’Auchtermuchty et de ses charriots, et nul ne visite ces lieux sans désirer d’y rester long-temps et d’y revenir bientôt.

Arrivé près de l’auberge favorite, toute l’autorité de Dryfesdale, bien diminuée par le bruit de sa disgrâce, ne put empêcher que le voiturier, aussi entêté que les animaux qu’il conduisait, ne s’y arrêtât quelques instants, quoique la petite distance qu’ils avaient parcourue ne laissât que peu de prétexte à cette halte. Le vieux Keltie, l’aubergiste, qui depuis a donné son nom à un pont voisin de sa demeure, reçut le voiturier avec sa cordialité ordinaire et le fit entrer dans la maison sous prétexte d’affaires importantes, mais bien, je crois, pour vider ensemble un pot d’usquebaugh. Tandis que le digne hôte et son convive étaient ainsi occupés, l’intendant disgracié, portant une double expression de mauvaise humeur dans son geste et dans son maintien, se promenait d’un air mécontent dans la cuisine, où se trouvait un voyageur. L’étranger était de petite taille, à peine sorti de l’adolescence. Il portait un habit de page, et avait, dans son regard et ses manières, un air de hardiesse et d’insolence hautaine et aristocratique qui aurait pu faire croire à Dryfesdale qu’il avait des prétentions à un rang supérieur, s’il n’avait su par expérience qu’on les rencontrait souvent chez les domestiques et les serviteurs militaires de la noblesse.

« Je vous souhaite le bonjour du pèlerin, vieillard, dit le jeune homme ; vous venez, je pense, du château de Lochleven. Quelles nouvelles apportez-vous de notre gente reine ? Jamais plus belle colombe n’a été renfermée dans un aussi misérable colombier.

— Ceux qui parlent de Lochleven et des gens que ses murs renferment, reprit Dryfesdale, parlent de ce qui regarde les