Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/34

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qui enfin parcourent en tous sens leur pays, non pour le ravager et l’appauvrir, mais en cherchant les moyens de le conserver, de l’enrichir et de l’embellir encore.

— Dans notre pays, mon Halbert, ces améliorations disparaîtraient comme un songe : les arbres seraient détruits par les Anglais, nos ennemis, avant qu’ils eussent cessé d’être des arbrisseaux, et le blé que vous auriez semé serait moissonné par le premier voisin qui aurait à sa suite plus de cavaliers que vous n’en pourriez rassembler. Mais pourquoi murmurer ? Le destin qui vous a fait naître Écossais vous a donné une tête, un cœur et un bras pour soutenir dignement ce nom.

— Il ne m’a point donné de nom à soutenir, » dit Halbert en se promenant lentement dans l’appartement. « Mon bras a été levé le premier dans toutes nos querelles ; ma voix s’est fait entendre dans tous les conseils, et les plus sages ne m’ont point censuré ; l’astucieux Lethington, le profond et sombre Morton, ont eu des conférences secrètes avec moi, et Grange et Lindsay ont reconnu que, sur le champ de bataille, j’ai rempli le devoir d’un brave chevalier. Mais le moment important où ils ont besoin de ma tête et de mon bras une fois passé, ils ne voient plus en moi que le fils de l’obscur tenancier de Glendearg. »

C’était là un sujet que lady Avenel redoutait toujours ; car le rang conféré à son mari, la faveur dont il jouissait auprès du puissant comte de Murray, et les grands talents par lesquels il justifiait ses droits à ce rang et à cette faveur, étaient des motifs qui augmentaient plutôt qu’ils ne diminuaient l’envie contre sir Halbert Glendinning, homme d’une naissance inférieure et obscure, qui, par son seul mérite personnel, s’était élevé à ce haut degré de considération. La fermeté naturelle de son âme ne suffisait pas pour lui faire mépriser l’avantage idéal d’une illustre généalogie, avantage si fort apprécié par tous les hommes avec qui il avait des rapports ; et les cœurs les plus nobles sont tellement accessibles à de puérils sentiments de jalousie, qu’il y avait des moments où il se sentait mortifié en voyant que son épouse pouvait se glorifier d’une naissance illustre et d’une longue suite d’ancêtres : alors il regrettait que son importance, comme propriétaire d’Avenel, ne fût due qu’à son mariage avec l’héritière de ce domaine. Il n’était pas assez injuste pour permettre à des sentiments aussi indignes de lui de prendre possession constante de son esprit ; mais ils se