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sujet perfide, d’un frère dénaturé, d’un faux conseiller, d’un faux ami. Un homme qui ne possédait qu’une chétive pension due à la bonté de la couronne, a été élevé par une reine jusqu’au rang de conseiller de Sa Majesté et de distributeur des dignités de l’État. Cet homme a tout reçu, rang, fortune, titres, crédit, pouvoir : il s’est vu grandir comme un champignon, par la généreuse influence de l’amitié d’une sœur. Et cette reine, cette sœur, par reconnaissance, il l’a enfermée dans un château triste et solitaire ; il l’a déposée ; et il l’assassinerait s’il en avait l’audace.

— Je ne pense pas si mal du comte de Murray, dit Roland Græme, et franchement, » ajouta-t-il avec un léger sourire, « il me faudrait quelque récompense pour me faire embrasser avec une résolution ferme et décidée un parti ou l’autre.

— Eh ! si ce n’est que cela, » dit Catherine Seyton avec enthousiasme, « vous aurez pour récompense les prières des sujets opprimés, du clergé persécuté, des nobles insultés, un honneur immortel dans les âges futurs, une reconnaissance ardente pour le présent, la gloire sur la terre et la félicité dans le ciel ! Votre pays vous bénira, votre reine vous devra tout, vous parviendrez d’un seul coup du plus bas au plus haut rang de la chevalerie, tous les hommes vous honoreront, toutes les femmes vous aimeront, et moi qui ai juré avec vous de travailler à la délivrance de Marie Stuart, je… oui, je vous aimerai plus qu’une sœur n’a jamais aimé son frère.

— Continuez, continuez ! » dit Roland en mettant un genou en terre, et en prenant la main que dans la chaleur de son exhortation Catherine lui avait tendue.

« Non, dit-elle en s’arrêtant, « j’en ai déjà trop dit, beaucoup trop si je ne réussis pas, avec vous, et trop peu si je réussis. Mais je réussirai, » continua-t-elle en lisant dans les yeux de Roland qu’il répondait à son enthousiasme. « Oui, je réussirai ; ou plutôt la bonne cause réussira par sa propre force, c’est ainsi que je te consacre à elle. » À ces mots, elle approcha son doigt de la tête de Roland étonné, et sans le toucher elle fit le signe de la croix sur son front ; puis elle inclina son visage vers lui et sembla baiser l’espace vide dans lequel elle avait tracé le pieux symbole. Alors se relevant et s’échappant, elle courut se réfugier dans la chambre de la reine.

La jeune fille enthousiaste était partie, et Roland restait encore un genou en terre, retenant sa respiration, et les yeux fixés sur