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château, s’il était possible, et de faire part de son dessein à George Douglas sans perdre de temps. Ce gentilhomme, silencieux comme à l’ordinaire, était assis à la poupe du petit esquif dont ils se servaient dans de telles occasions, arrangeant ses ustensiles de pêche, et de temps en temps indiquant par signes à Roland, qui maniait les rames, où il devait diriger la barque. Lorsqu’ils furent à quelque distance du château, Roland cessa de ramer, et s’adressant un peu brusquement à son compagnon : « J’ai quelque chose d’important à vous dire, si votre plaisir est de m’écouter, messire. »

À ces mots la passive mélancolie du visage de Douglas disparut ; il tressaillit, et regarda le page de l’air empressé et pénétrant de quelqu’un qui s’attend à une communication grave et alarmante.

« Je suis fatigué à la mort de votre château de Lochleven, continua Roland.

— Est-ce là tout ? dit Douglas ; je ne connais aucun de ses habitants qui soit plus charmé de son séjour.

— Mais je ne suis ni membre de la famille, ni prisonnier ; je puis donc raisonnablement songer à changer de demeure.

— Vous auriez les mêmes raisons pour en changer, si vous étiez en même temps l’un et l’autre.

— Non seulement je suis fatigué de vivre dans le château de Lochleven, mais même je suis tout à fait déterminé à l’abandonner.

— C’est une résolution plus aisée à prendre qu’à exécuter.

— Aucunement, si Votre Seigneurie et votre mère lady Lochleven y consentent.

— Vous vous trompez, Roland ; vous verrez que le consentement de deux autres personnes est également essentiel, celui de la reine Marie votre maîtresse, et celui de mon oncle le régent qui vous a placé auprès de sa personne, et qui n’entendra pas qu’elle change si tôt les personnes de sa suite.

— Et dois-je rester ici bon gré mal gré ? » demanda le page un peu effrayé d’une perspective qu’une personne douée de plus d’expérience aurait entrevue plus tôt.

— Du moins, répondit George Douglas, vous devez y rester jusqu’à ce qu’il plaise à mon oncle de vous en faire sortir.

— Franchement, en vous parlant comme à un gentilhomme incapable de me trahir, je vous avouerai que, si je me croyais prisonnier ici, ni les murs ni le lac ne pourraient long-temps m’y retenir.