Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/274

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parlerai de cela à George Douglas demain, lorsque nous irons ensemble à la pêche. »

Il passa la nuit sans dormir, en agitant cette résolution magnanime ; et le lendemain matin, lorsqu’il se leva, il n’était pas encore bien décidé s’il la tiendrait ou non. Il arriva qu’il fut appelé par la reine à une heure inaccoutumée et à l’instant même où il allait partir avec George Douglas. Il se rendit au jardin pour recevoir ses ordres ; mais, comme la ligne qu’il tenait à la main annonçait son intention, la reine, se tournant vers lady Fleming, lui dit : « Catherine peut chercher quelque autre amusement pour nous, ma bonne amie, notre prudent page a déjà formé sa partie de plaisir pour aujourd’hui.

— J’ai dit dès le commencement, répondit lady Fleming, que Votre Grâce ne tirerait aucune ressource de la compagnie d’un jeune homme qui a tant de connaissances parmi les huguenots et qui a les moyens de passer son temps plus agréablement qu’avec nous.

— Je souhaite, » ajouta Catherine, dont le visage animé se colora de dépit, « que ses amis nous débarrassent de lui et nous ramènent en sa place un page, si toutefois il s’en trouve un, fidèle à sa reine et à sa religion.

— Une partie de vos souhaits peut s’accomplir, madame, » dit Roland Græme, incapable de retenir plus long-temps les sentiments qu’excitait en lui le mauvais accueil qu’il recevait de tout le monde, et il fut sur le point d’ajouter : « Je vous souhaite de tout mon cœur en ma place un page, s’il peut s’en trouver un, qui soit capable d’endurer les caprices des femmes sans en devenir fou. » Heureusement il se rappela le remords qu’il avait senti pour avoir cédé à sa vivacité de caractère dans une occasion semblable ; et, fermant la bouche, il retint sur ses lèvres un reproche si déplacé en présence d’une reine.

« Pourquoi restez-vous ici, dit la reine, comme si vous aviez pris racine dans le parterre ?

— Seulement pour attendre les ordres de Votre Grâce, répondit le page.

— Je n’en ai pas à vous donner. Allez, monsieur ! »

Comme il quittait le jardin pour gagner la barque, il entendit distinctement Marie réprimander une de ses dames en ces termes : « Vous voyez à quoi vous nous avez exposées. »

Cette courte scène fixa Roland dans la résolution de quitter le