Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/254

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au torrent, et soyez assurée qu’en signant cet acte qu’ils vous présentent vous ne vous engagez à rien, puisque votre signature manque de ce qui seul peut la rendre valide, la libre volonté de celle qui la donne.

« Ah ! voilà ce que me conseille lord Seyton, répondit Marie ; cependant il me semble que la fille de tant de rois, en cédant le droit qu’elle tient de sa naissance, parce que les rebelles la pressent de leurs menaces, se montrerait peu digne du trône, et qu’en lisant les annales de mon règne, la postérité regarderait cette cession comme une tache à la renommée de Marie Stuart. Non ! sir Robert Melville, les traîtres peuvent m’accabler de menaces terribles et de paroles insolentes ; mais ils n’oseront jamais porter leurs mains sur notre personne.

— Hélas ! madame, ils ont déjà tant osé, et ils ont déjà été si loin qu’ils n’ont plus qu’un pas à faire pour en venir à la dernière extrémité.

— Oh ! jamais, » dit la reine, ses craintes l’accablant de nouveau, « des nobles écossais ne voudraient prêter leurs mains pour assassiner une femme sans secours !

— Pensez-vous, madame, répondit Melville, à tant d’horribles scènes dont nous avons été témoins ? Est-il action si noire qu’une main écossaise n’ait pas osé accomplir ? Lord Lindesay, outre son caractère naturellement farouche et emporté, est proche parent de Henri Darnley, et Ruthven a conçu des plans profonds et dangereux. De plus, le conseil parle de preuves écrites, d’une cassette de lettres… que sais-je enfin ?

— Ah ! bon Melville ! répondit la reine, si j’étais aussi sûre de l’intégrité de mes juges que de mon innocence… Et cependant…

— Oh ! songez, madame, dit Melville, que l’innocence même doit quelquefois se soumettre pour un temps au blâme injurieux. En outre vous êtes ici… »

Il jeta un regard autour de lui, et s’arrêta.

« Parlez Melville, dit la reine, aucun de ceux qui approchent de ma personne ne peut me vouloir du mal ; jusqu’à ce pauvre page que j’ai vu aujourd’hui pour la première fois de ma vie, je ne crains pas que tous entendent ce que vous allez me communiquer.

— Eh bien ! madame, répondit Melville, dans une telle occasion, et comme il a apporté le message de lord Seyton, je parlerai devant lui et devant ces belles dames, dont je ne conteste point la fidélité