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— Non, interrompit lady Avenel, votre petit-fils ne sera pas exposé ici à mener une vie aussi impie. Mon mari est juste et bon envers ceux qui suivent sa bannière, et vous savez fort bien vous-même que les jeunes gens ont ici un précepteur sévère dans la personne de notre chapelain. »

La vieille femme parut réfléchir.

« Vous avez mentionné, dit-elle, la seule circonstance qui puisse me déterminer. Il faudra bientôt que je parte ; la vision l’a dit. Il ne faut pas que je m’arrête ; il faut que j’aille… il faut que j’aille… c’est mon destin. Jurez donc que vous protégerez l’enfant comme si c’était le vôtre, jusqu’à ce que je revienne ici et que je le réclame, et je consentirai à m’en séparer pour un temps. Mais, surtout, jurez qu’il ne sera pas privé des instructions du saint homme qui a mis les vérités de l’Évangile à l’abri des atteintes de l’idolâtrie monacale.

— Soyez tranquille, reprit la dame d’Avenel ; j’aurai autant soin de l’enfant que s’il était né de mon propre sang. Voulez-vous le voir maintenant ?

— Non, » répondit la vieille femme avec une sauvage fermeté ; « je pars pour remplir ma mission je ne veux pas attendrir mon cœur par des larmes et des lamentations inutiles, comme si je n’étais pas appelée à m’acquitter d’un devoir.

— N’accepterez-vous pas quelque chose pour vous aider dans votre pèlerinage ? » demanda la dame d’Avenel en lui mettant dans la main deux couronnes du soleil. La vieille femme les jeta sur la table.

« Suis-je de la race de Caïn, femme orgueilleuse, s’écria-t-elle, pour que vous m’offriez de l’or en échange de ma chair et de mon sang ?

— Je n’avais pas une pareille intention, » dit la dame avec douceur, « et je ne suis point une femme orgueilleuse comme il vous plaît de le dire. Hélas ! mes propres infortunes m’auraient enseigné l’humilité, quand même elle ne serait pas née avec moi. »

La vieille femme parut se relâcher un peu de son ton de sévérité.

« Vous êtes d’un sang noble, reprit-elle, autrement nous n’aurions pas conversé si long-temps ensemble ; vous êtes d’un sang noble, et l’orgueil, » ajouta-t-elle en relevant sa haute taille à mesure qu’elle parlait, l’orgueil sied à un sang noble comme le panache sied à la toque. Mais, quant à ces pièces d’or, milady, il