Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/238

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— Je n’attendrai pas davantage, répondit lord Lindesay ; il est grand temps que notre affaire soit terminée, et que nous soyons en chemin pour retourner au conseil. Cependant vous pouvez essayer vos voies de douceur, comme vous les appelez, tandis que j’irai faire préparer un pétard par mes gens. Je suis venu ici muni d’aussi bonne poudre que celle qui a fait sauter l’église de Field.

— Pour l’amour de Dieu, un peu de patience ! reprit Melville ; » et s’approchant de la porte : « Faites savoir à la reine, dit-il, que moi, Robert Melville son fidèle serviteur, je la conjure par intérêt pour elle-même, et pour prévenir des conséquences plus fâcheuses, de faire ouvrir la porte, et d’admettre auprès d’elle lord Lindesay, chargé d’une mission du conseil d’état.

— Je vais informer la reine de votre message, répondit Roland, et je vous rapporterai la réponse. »

Il courut à la porte de la chambre à coucher, et y frappa doucement : la plus âgée des deux dames l’ouvrit à l’instant. Il lui fit part de ce qui venait d’arriver ; elle alla en instruire la reine, et revint bientôt apporter à Roland l’ordre de laisser entrer sir Robert Melville et lord Lindesay. Le page retourna dans l’antichambre, en ouvrit la porte, et Lindesay se présenta de l’air d’un soldat qui, les armes à la main, s’est frayé un chemin dans une forteresse conquise ; lord Melville le suivait à pas plus lents.

« Je vous prends à témoin, dit le page à ce dernier, que, sans l’ordre exprès de la reine, j’aurais défendu cette entrée de toutes mes forces et au prix de tout mon sang contre l’Écosse entière.

— Silence, jeune homme, dit Melville d’un ton grave et sévère ; n’ajoute pas de tisons au feu. Ce n’est pas le temps de faire parade de ta chevalerie enfantine.

— Elle n’a même pas encore paru, » s’écria Lindesay, qui venait d’atteindre le milieu de la salle d’audience ; « comment appelez-vous ce badinage ?

— Patience, milord, répondit sir Robert, le temps ne presse pas ; lord Ruthven n’est pas encore descendu. »

En ce moment la porte de l’appartement s’ouvrit, et la reine parut. Elle s’avança avec cet air de grâce et de majesté qui lui était particulier, sans paraître nullement émue ni de la visite, ni des procédés grossiers qui l’avaient accompagnée. Elle était vêtue d’une robe de velours noir ; une petite fraise, ouverte sur le devant, laissait voir la beauté de son menton et de son cou, mais son sein était voilé. Elle portait sur la tête un petit bonnet de dentelle