Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/200

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flottants pour détourner mon attention. Quant à présent, j’ai besoin d’entrer dans le monde et de considérer tout ce qui m’environne.

— Vous ne ferez pas une enjambée sans moi, s’écria le fauconnier, jusqu’à ce que le régent vous prenne de mes mains sain et sauf. Si vous le voulez, nous irons à l’hôtellerie de Saint-Michel, et vous y verrez assez de monde, mais par la fenêtre, m’entendez-vous ? Quant à courir les rues pour chercher des Seyton et des Leslie, et faire faire dans votre nouveau justaucorps une douzaine de boutonnières avec une rapière ou un poignard, je n’y consentirai nullement.

— Eh bien ! de tout mon cœur, dit le page, allons à l’hôtellerie de Saint-Michel. Ils quittèrent donc le palais, après avoir fait connaître leurs noms et les motifs de leur sortie aux sentinelles qui venaient de prendre leurs postes à la porte pour la soirée : celles-ci ouvrirent un petit guichet du portail étroitement fermé, laissèrent passer le jeune page et son guide, qui arrivèrent bientôt à l’auberge ou hôtellerie de Saint-Michel. Elle était située au fond d’une grande cour donnant sur la principale rue d’Édimbourg, au bas de Carlton-Hill. C’était un grand bâtiment tout en ruines et fort incommode, semblable à ces caravansérails de l’Orient, où les voyageurs trouvent un abri, il est vrai, mais où ils sont obligés de pourvoir eux-mêmes à tous leurs besoins, plutôt qu’à une de nos auberges modernes,

« Où rien ne manque à qui jamais
Ne demande le prix des mets. »

Cependant le tumulte et la confusion de ce lieu de rendez-vous public offraient aux yeux novices de Roland intérêt et plaisir. Lui et son compagnon trouvèrent facilement la grande salle, sans que l’hôte la leur eût indiquée. Elle était remplie de voyageurs et d’habitants de la ville, qui entraient et sortaient, se rencontraient et se saluaient, jouaient ou buvaient ensemble, sans faire attention au reste de la compagnie. Ils formaient le plus frappant contraste avec l’ordre sévère et le monotone silence dans lesquels tout se passait au château d’Avenel. Des bruits de toute espèce, depuis le rire franc qu’excitaient de joyeuses plaisanteries jusqu’aux éclats d’une grossière dispute, sortaient des divers groupes ; et cependant le bruit et les voix confondues paraissaient ne