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ces concouraient naturellement à exalter, Roland Græme se fit bientôt remarquer par le son de sa voix et par ses éclats de rire au milieu du bruit des chevaux du cortège. Il attira plus d’une fois l’attention du chef, qui s’aperçut avec satisfaction que le jeune homme raillait de bonne humeur ceux qui le plaisantaient sur son congé et sur son retour au service de la maison d’Avenel.

« Je pensais que la branche de houx de votre toque avait été flétrie, maître Roland, dit un des hommes d’armes.

— Elle a éprouvé la gelée d’une demi-heure, répliqua-t-il ; vous voyez qu’elle est aussi verte que jamais.

— C’est une plante trop forte pour un terrain aussi chaud que votre tête, maître Roland Græme, » reprit l’homme d’armes, vieil écuyer de sir Halbert Glendinning.

« Si elle ne fleurit pas seule, dit Roland, j’y mêlerai le laurier et le myrte et les ferai monter si haut qu’ils me dédommageront de leur croissance tardive. »

En parlant ainsi il donna de l’éperon dans les flancs de son cheval, et, le retenant en même temps, il le contraignit à exécuter un mouvement brusque, mais plein de grâce. Sir Halbert Glendinning considérait la conduite de son nouvel aspirant avec ce plaisir mélancolique de l’homme mûr, qui, après avoir long-temps recherché les jouissances de la vie et reconnu leur vanité, voit le jeune homme gai et léger, pour lequel la vie n’est encore qu’espérance et promesse.

Cependant Adam Woodcock, le fauconnier, s’étant débarrassé de son déguisement et revêtu, d’après son rang et sa profession, d’un justaucorps vert auquel pendait un sac d’un côté, et de l’autre un couteau de chasse, portant à la main gauche un gant qui lui montait jusqu’au milieu du bras, et la tête couverte d’une toque à plumes, s’approcha de la cavalcade aussi vite que pouvait trotter son petit cheval : il entra sur-le-champ en conversation avec Roland Græme.

« Ainsi, jeune homme, vous voilà encore une fois sous l’ombrage de la branche de houx ?

— Et en état de vous rendre, mon bon ami, vos dix groats d’argent.

— Dette que vous m’auriez presque payée, il n’y a guère qu’une heure, avec dix pouces d’acier. Sur ma foi ! il est écrit dans le livre de ma destinée qu’après tout je dois tâter de votre poignard.

— Ne parlez pas ainsi, mon bon ami ; j’aurais plutôt percé mon