Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/124

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Sois ferme, courageux champion, défends la fatale brèche… lève-toi, pilote intrépide et expérimenté, et saisis le gouvernail tandis que la tempête déploie sa fureur… retourne au combat, toi qui relèves l’étendard tombé… sers toi de la houlette et de la fronde, pasteur d’un troupeau dispersé !

— Paix, ma sœur, je vous prie ! » dit le portier en ouvrant un passage qui donnait dans la grande église ; les frères vont célébrer leur élection par une messe solennelle. Je vais guider leur marche à l’autel… toutes les charges de cette vénérable maison sont maintenant tombées sur un pauvre vieillard décrépit. »

Il quitta l’église, et Madeleine et Roland restèrent seuls sous ces voûtes immenses dont l’architecture, d’un style riche, mais pur, se reportait à la dernière moitié du quatorzième siècle, époque des plus beaux monuments gothiques. Mais les niches étaient privées de leurs statues à l’intérieur comme au dehors, et les tombeaux des guerriers et des princes avaient été confondus dans une destruction commune avec les châsses vénérées par l’idolâtrie. De grandes lances et des épées antiques, qui avaient été longtemps suspendues sur la tombe des puissants guerriers des premiers temps, gisaient maintenant éparses au milieu des offrandes dont chaque pèlerin avait orné les reliques de son saint ; et les fragments de statues de guerriers et de dames, qui naguère reposaient couchés ou agenouillés, dans une attitude de dévotion, sur le lieu qui renfermait leurs restes mortels, étaient maintenant confondus avec les débris des saints et des anges, ouvrages du ciseau gothique que des mains destructives avaient précipités du haut de leurs niches sur le pavé du temple profané.

Mais quelque chose de plus douloureux que la destruction même frappait les regards. Bien que ces violences eussent été commises depuis plusieurs mois, les moines avaient tellement perdu toute espèce d’énergie qu’ils n’avaient pas même essayé de déblayer les décombres, ou de remettre l’église dans un état peu plus convenable. Ce commencement de restauration n’eût pas demandé beaucoup de travail. Mais la terreur accablait les faibles restes d’un corps jadis si puissant ; et sachant bien qu’on ne les laissait dans leur ancienne demeure que par tolérance et compassion, ils n’osaient rien faire qu’on pût prendre pour une revendication de leurs anciens droits, se contentant d’accomplir leurs