Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/114

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le laisse à décider à madame l’abbesse et à ma vénérable grand’mère. Je pense que l’alouette qu’elles ont laissée derrière elles ne demanderait pas mieux non plus que de faire entendre ses chants sous la voûte du ciel. »

Un escalier tournant, étroit et raide, comme pour rappeler aux religieuses leurs devoirs de jeûne et de macération, le conduisit à d’autres appartements qui formaient le rez-de-chaussée de l’édifice. Ils avaient un aspect plus triste encore que ceux qu’il venait de quitter ; car ayant essuyé la première fureur des assaillants qui avaient ravagé le monastère, les fenêtres avaient été brisées, les portes renversées, et même les cloisons qui séparaient les pièces, détruites en plusieurs endroits. Après avoir ainsi marché de ruine en ruine, il songeait à terminer une visite aussi peu intéressante, et à regagner la chambre qu’il avait quittée, lorsqu’il entendit avec surprise, tout près de lui, le mugissement d’une vache. Il s’y attendait si peu, qu’il tressaillit comme s’il eût ouï rugir un lion, et il avait la main à son poignard quand la forme gracieuse et légère de Catherine Seyton parut à la porte de la pièce d’où le bruit était parti.

« Bon soir, vaillant champion, dit-elle ; depuis le temps de Guy de Warwick, nul ne fut plus digne de combattre une vache brune.

— Une vache ! s’écria Roland Græme ; par ma foi, je croyais entendre le diable rugir près de moi. Qui jamais eût pensé trouver ainsi une étable au milieu d’un couvent ?

— La vache et le veau peuvent venir ici, répondit Catherine, car nous n’avons plus moyen de leur en défendre l’entrée. Mais je vous en prie, beau sire, retournez à l’appartement que vous avez quitté.

— Non pas avant d’avoir vu l’animal qui est confié à vos soins, ma jolie sœur, » répliqua Roland : et il entra dans l’appartement, en dépit des remontrances moitié sérieuses, moitié badines de la jeune fille.

La pauvre vache, maintenant la seule recluse du couvent, avait pour étable une vaste pièce, qui était auparavant le réfectoire du monastère. Le plafond était orné de moulures arquées, et les murailles de niches, dont les images avaient été renversées. Ces restes d’ornements d’architecture faisaient un singulier contraste avec la crèche et la mangeoire grossières construites pour la vache dans un coin de la pièce, et le fourrage amoncelé auprès pour sa nourriture.