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une des fenêtres de l’appartement donnant sur un large balcon qui, avec sa lourde balustrade, s’étendait jadis d’un bout à l’autre du château, du côté du midi et en face du ruisseau, et présentait une promenade en plein air fort agréable et fort commode. La balustrade était tombée en plusieurs endroits, et la terrasse dégradée et rétrécie ; toutefois on pouvait encore s’y promener sans danger. C’est ce que firent nos deux vieilles dames, toujours occupées de leur conversation, mais pas assez, comme Roland le remarqua, pour ne pas jeter un coup d’œil en passant et repassant devant la porte vitrée, afin de savoir ce qui se faisait dans le Salon.


CHAPITRE XI.

roland et catherine.


La vie a son mai et sa joyeuse saison ; les arbres font une musique, et les fleurs sont tout parfum. Les orages même ont alors un charme ; et les vierges qui déploient leurs manteaux pour garantir leurs robes légères se rient de la pluie qui les mouille.
Ancienne comédie.


Catherine était dans l’âge heureux de l’innocence et de la gaieté ; quand le premier moment d’embarras fut passé, la situation fausse où on l’avait mise en la laissant tout à coup faire connaissance avec un beau jeune homme dont elle ignorait même le nom, s’offrit malgré elle à son esprit sous un point de vue comique. Elle baissa ses beaux yeux sur l’ouvrage qui l’occupait, et garda une gravité imperturbable pendant les deux premiers tours des matrones sur la terrasse ; mais quand elle leva ses yeux bleu-foncés sur Roland, et qu’elle vit dans quel embarras pénible il se trouvait, se tournant sur sa chaise, portant les mains à son bonnet, et montrant par toute sa contenance qu’il ne savait comment entamer l’entretien, elle ne put garder plus long-temps son maintien grave : incapable de se livrer à une autre pensée, elle jeta un éclat de rire bien franc, quoique involontaire ; en même temps, ses beaux yeux, également animés par la joie, brillèrent d’un éclat si vif à travers les larmes qui les inondaient, et les tresses de ses longs cheveux flottèrent avec tant de grâce, que certes la déesse même de la