Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/165

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De toute riante chose
Je suis l’esprit et le sens ;
Je suis l’invisible cause
Du coloris de la rose
Et l’âme de son encens.

C’est moi qui dans la prairie,
Sur les bords des clairs ruisseaux
Où le peuple de féerie
Trace sa ronde chérie
Aux fraîches senteurs des eaux ;

Aux clairières des coudraies
Sur qui s’ouvre un ciel d’azur,
Dans les pâles oseraies,
Et sur les vertes orées
Des bois, où l’air est si pur ;

Doux murmure ou doux silence,
Parfum digne des autels,
C’est moi qui dors ou m’élance,
Moi qui fuis ou me balance,
Pour charmer tes sens mortels.

Pourtant cette vie active
Qui va par mille chemins,
D’objets en objets captive,
Est encore moins fugitive
Que la vôtre, ô fiers humains

Hélas ! trop longue carrière
Qui nous use ; rien ne suit !
Notre incertaine lumière
Empruntée à la matière
Cède à l’éternelle nuit.

Mais pour l’homme, il ne consume
Jamais son être en entier :
À peine sa torche fume,
Qu’une autre en lui se rallume
Pour éclairer son entier.

La Dame Blanche cessa de parler, et parut attendre une réponse. Mais comme Halbert hésitait sur la manière d’arranger ses paroles, la vision sembla se décolorer graduellement et devenir de plus en plus vaporeuse. Pensant avec raison que c’était un signe qu’elle