Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/132

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à un religieux de l’abbaye de Sainte-Marie, à laquelle votre maître a tant d’obligations ?

— Il se propose d’en contracter de nouvelles, sire moine, répondit Christie ; car ayant appris que sa belle-sœur, la veuve de Walter Avenel, était à son lit de mort, il m’envoie dire au père abbé et aux moines qu’il veut célébrer les funérailles dans leur couvent. En conséquence, il s’invite à passer trois jours et trois nuits avec quelques amis et une vingtaine de cavaliers, gens et chevaux, aux frais de votre communauté ; laquelle intention il signifie bien et dûment, pour que les préparatifs convenables soient faits en temps utile.

— L’ami, dit le sous-prieur, ne pense pas que je veuille insulter le père abbé en me chargeant d’un semblable message. Crois-tu que les biens de l’Église lui aient été donnés par des princes pieux et des nobles zélés pour être dissipés en débauche par chaque libertin laïque traînant à sa suite plus de gens qu’il ne peut en entretenir au moyen de ses revenus ? Dis à ton maître, de la part du sous-prieur de Sainte-Marie, que le primat nous a donné l’ordre de ne plus nous soumettre à ces sortes d’exactions, faites sous le vain prétexte de demander l’hospitalité. Nos terres, nos domaines nous ont été concédés pour être employés au soulagement des pèlerins et des personnes pieuses, et non en festins licencieux pour une soldatesque grossière.

— Et c’est à moi, » dit le sauvage porte-lance, « c’est à moi et à mon maître que s’adresse un pareil langage ? Prenez garde à vous, sire prêtre, et essayez si des ave et des credo empêcheront vos bestiaux de s’égarer et vos meules de foin de brûler.

— Oses-tu menacer de pillage et d’incendie le patrimoine de la sainte Église, dit le sous-prieur, et cela à la face du soleil ? Je prends tous ceux qui m’écoutent à témoin des paroles de ce brigand. Songe aux gens de ton espèce que lord James a fait noyer par vingtaines dans le noir étang de Jeddart[1]. C’est à lui et au primat que je porterai mes plaintes. »

Le soldat changea la position de sa lance et la baissa jusqu’à la mettre au niveau du corps du moine.

La dame Glendinning se mit à crier au secours. « Tibb Tacket ! Martin ? où êtes-vous tous ? Christie, pour l’amour de Dieu ! considérez que c’est un membre de la sainte Église.

  1. Jeddart, corruption écossaise pour Jedburgh, ville d’Écosse, sur la rivière de Jed. a. m.