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conduire en sûreté à la maison de Cedric. « Et il ordonna à un de ses gens de monter son propre cheval, et de donner le sien à l’étranger qui allait leur servir de guide.

Ce conducteur prit une route tout-à-fait opposée à celle que leur avait indiquée Wamba, dans l’intention de les égarer. En suivant ce sentier ils s’enfonçaient de plus en plus dans les bois ; souvent obligés de traverser des ruisseaux dont l’approche était rendue dangereuse par les marécages au milieu desquels ils serpentaient ; mais l’étranger semblait connaître, comme par instinct, les points où un passage solide et sûr pouvait être tenté ; enfin, à force de prudence et de précautions, il les amena sains et saufs au milieu d’une avenue beaucoup plus large qu’aucune de celles qu’ils avaient vues jusqu’alors ; et montrant un bâtiment irrégulier, vaste et peu élevé qui se trouvait à l’extrémité de cette avenue, il dit au prieur : « Là-bas est Rotherwood, la demeure de Cedric le Saxon. »

On ne pouvait donner à Aymer une plus agréable nouvelle. Ses nerfs, loin d’être robustes et vigoureux, avaient éprouvé une telle agitation, une telle crise au milieu des dangers qu’ils avaient courus en traversant les marécages, qu’il n’avait pas encore eu la curiosité d’adresser une seule question à son guide. Mais alors il se voyait hors de péril et sur le point de trouver un abri : aussi sa curiosité commença-t-elle à renaître ; s’adressant donc à l’étranger, il lui demanda son nom et sa profession.

« Je suis pèlerin, j’arrive de la Terre-Sainte, » répondit l’étranger.

« Vous eussiez mieux fait d’y rester et d’y combattre pour la délivrance du saint Sépulcre, » dit le templier.

« Vous avez raison, révérend chevalier, reprit le pèlerin, à qui l’aspect du templier semblait parfaitement connu ; mais lorsque ceux qui se sont engagés par serment à recouvrer la Cité sainte voyagent si loin du lieu où les appelle leur devoir, y a-t-il de quoi s’étonner qu’un humble paysan, comme moi, décline la tâche qu’ils ont abandonnée ? »

Le templier allait lui faire une aigre réponse ; mais il en fut empêché par le prieur, qui exprima de nouveau sa surprise que leur guide, après une aussi longue absence, se rappelât si bien les chemins de la forêt. « Je naquis dans ces lieux, » répondit celui-ci, et comme il faisait cette réponse, ils arrivèrent devant la maison de Cedric, bâtiment informe et peu élevé, avec plusieurs grandes cours, s’étendant sur un espace considérable de terrain, et qui,