Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/326

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le soin de sa propre conservation, placer devant elle son bouclier triangulaire recouvert d’acier, puis la quitter en poussant son cri de guerre, se précipiter au milieu des ennemis, et, après avoir fait mordre la poussière à ceux qui se présentaient les premiers, retourner encore à ses côtés.

Athelstane qui, comme on sait, était indécis et indolent, ne manquait cependant pas de bravoure. En regardant avec attention cette femme voilée, de laquelle le templier ne s’éloignait pour ainsi dire pas, son instinct jaloux le porta à penser que c’était lady Rowena, et que Bois-Guilbert voulait l’enlever à tout prix.

« Par l’âme de saint Édouard ! s’écria-t-il, je la délivrerai des mains de cet orgueilleux chevalier, je le ferai tomber sous mes coups.

— Prenez garde, » lui dit le railleur Wamba : « pour vouloir trop se presser on pêche une grenouille au lieu d’un poisson. Par ma marotte, ce n’est point lady Rowena : voyez ces longs cheveux noirs… Si vous ne savez pas distinguer le blanc du noir, je renonce à vous suivre. Marchez en avant, si bon vous semble ; quant à moi, je n’irai pas me faire rompre les os sans savoir pour qui… D’ailleurs vous êtes sans armure… Prenez-y garde, jamais bonnet de soie n’a résisté à un acier bien trempé… Ah ! vous voulez absolument aller à l’abreuvoir ; en bien ! vous boirez un coup. Deus vobiscum, vaillant Athelstane ! » En achevant ces mots, il s’éloigna du Saxon qu’il avait jusqu’alors retenu par sa tunique.

S’emparer d’une masse d’armes que la main d’un soldat expirant venait d’abandonner, s’élancer sur la troupe du templier en frappant à droite et à gauche, et renversant un guerrier à chaque coup, ne fut pour le robuste et vigoureux Athelstane, alors animé d’une fureur extraordinaire, que l’œuvre d’un moment. Il arriva bientôt à peu de distance de Bois-Guilbert, et lui cria d’une voix de tonnerre : « À moi, chevalier félon ! Laisse là celle que tu es indigne de toucher ! À moi, chef d’une bande de voleurs et d’assassins !

— Chien que tu es, » répondit le templier en grinçant les dents, « je vais t’apprendre à blasphémer ainsi le saint ordre du temple de Sion ; » et faisant faire une courbette à son coursier, il fondit sur le Saxon en se levant sur les étriers pour augmenter la force naturelle de son bras, et lui asséna sur la tête un coup épouvantable.

Wamba avait eu raison de dire que « bonnet de soie ne résistait pas à acier bien trempé. » Le sabre du templier était si tranchant, qu’il fit voler en éclats le manche de la hache d’armes que le mal-