Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/324

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criait d’une voix de tonnerre : « Infernal templier, opprobre de ton ordre, laisse cette jeune fille ! Traître de Bois-Guilbert, c’est Ivanhoe qui te l’ordonne ! Scélérat ! que ne puis-je te percer le cœur !

— Sans tes cris, Wilfrid, » dit le chevalier Noir qui entra en ce moment dans la chambre, « je ne t’aurais pas trouvé.

— Si tu es un chevalier, dit Ivanhoe, ne t’occupe pas de moi ; mets-toi à la poursuite de ce ravisseur ; sauve lady Rowena ; cherche le noble Cedric.

— Chacun aura son tour, répondit le chevalier Noir ; à présent c’est le tien. » Et, prenant Ivanhoe dans ses bras, il l’emporta avec autant de facilité que le templier enlevait Rébecca, courut à la poterne, où il confia son fardeau aux soins de deux archers, et rentra dans le château pour aider à sauver les autres prisonniers.

La flamme brillait alors dans une des tourelles, d’où elle s’échappait par les fenêtres et les meurtrières. Cependant, dans plusieurs endroits, la grande épaisseur des murs et celle des voûtes des appartements résistait au progrès de l’incendie. Mais, d’un autre côté, la rage de l’homme déployait ses fureurs avec non moins de violence que l’élément destructeur : les assiégeants poursuivaient de chambre en chambre les défenseurs du château, et assouvissaient dans leur sang la vengeance qui les animait contre les soldats du farouche Front-de-Bœuf. La majeure partie de la garnison fit une résistance opiniâtre ; un petit nombre demanda quartier ; mais personne ne l’obtint. L’air retentissait du bruit des armes et des gémissements ; les planchers, rougis du sang des morts et des blessés, devenaient glissants et dangereux.

Au milieu de cette scène de confusion, Cedric allait de chambre en chambre, cherchant partout lady Rowena : il était suivi du fidèle Gurth, qui, oubliant sa propre sûreté, s’efforçait de détourner les coups dirigés contre son maître. Le noble Saxon fut assez heureux pour trouver sa pupille, au moment où, perdant toute espérance de salut, elle pressait, avec toute l’angoisse du désespoir, un crucifix contre son sein, attendant la mort, que tout lui faisait considérer comme très prochaine. Il la confia aux soins de Gurth, et le chargea de la conduire à la barbacane, avec laquelle on pouvait dès lors communiquer sans crainte de l’ennemi, et sans s’exposer aux flammes qui n’y étaient pas encore parvenues. Après quoi, le loyal Cedric se mit à la recherche de son ami Athelstane, déterminé à s’exposer à tous les dangers pour sauver ce dernier rejeton