Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/309

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— Retournons donc aux murailles, » dit de Bracy d’un ton d’insouciance : « il n’y a personne, fût-il Turc ou templier, qui fusse moins de cas de la vie que moi ; mais du moins il n’y a pas de honte à regretter de n’avoir pas ici une quarantaine de mes francs compagnons. Ô mes braves lances ! si vous saviez dans quelle situation se trouve aujourd’hui votre capitaine, je verrais bientôt ma bannière flotter devant votre escadron, et cette misérable troupe de vilains, incapable de soutenir votre choc, ne tarderait pas à prendre la fuite.

— Regrette qui tu voudras ; mais, en attendant, défendons-nous comme nous pourrons avec les soldats qui nous restent. Ce sont pour la plupart des gens de la suite de Front-de-Bœuf, qui se s ont fait détester des Anglais par mille traits d’insolence et d’oppression.

— Tant mieux ! ces vils esclaves se battront tant qu’il leur restera ygg goutte de sang dans les veines, pour se soustraire à la vengeance des paysans qui nous attaquent. À notre poste, donc, Brian de Bois-Guilbert ; et sois sûr que, soit qu’il survive, soit qu’il succombe, tu verras aujourd’hui Maurice de Bracy se comporter en chevalier de haute valeur et de noble lignage.

— Aux murailles ! » s’écria le templier ; et ils y montèrent tous deux, afin de prendre pour la défense de la place toutes les mesures que pouvait dicter l’expérience et le courage exécuter. Ils reconnurent d’abord que le point le plus exposé était le poste en face des ouvrages extérieurs, dont les assiégeants s’étaient rendus maîtres, À la vérité, le château était séparé de cette barbacane par le fossé, et il était impossible à ceux-ci d’attaquer la poterne avant d’avoir surmonté cet obstacle : mais le templier et de Bracy étaient également d’opinion que les assaillants chercheraient, par une attaque formidable, à attirer de ce côté l’attention du plus grand nombre des assiégés, et en profiteraient pour opérer une diversion sur un autre point. Tout ce qu’ils purent faire pour se prémunir contre un pareil danger, vu le petit nombre de leurs gens, ce fut de placer de distance en distance, sur les murailles, des sentinelles qui communiqueraient les unes avec les autres, et auxquelles ils recommandèrent de donner l’alarme à la moindre apparence de danger. Ils convinrent aussi que de Bracy se chargerait de défendre la poterne, tandis que le templier, avec environ une vingtaine d’hommes, comme corps de réserve, se tiendrait prêt à porter immédiatement du secours partout où il serait nécessaire. La perte de la