Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/299

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— Paraît-il y avoir d’autres chefs ?

— De l’endroit où je suis je n’en vois aucun autre : il est probable que l’autre côté du château est également assailli. Mais les voilà qui s’avancent ! Dieu de Sion, protège-nous ! Quel spectacle épouvantable ! Ceux qui marchent les premiers portent des boucliers énormes, et poussent devant eux un mur fait de planches ; d’autres qui les suivent bandent leurs arcs, ils y ajustent leurs flèches ! Dieu de Sion, pardonne aux créatures que tu as formées ! »

Tout-à-coup sa description fut interrompue par le signal de l’attaque donné par le son aigu d’un cor ; et du haut des murailles les trompettes normandes, auxquelles se mêlait le son grave et sourdement prolongé des nakirs (sorte de timbales), répondirent à ce signal, pour faire connaître à l’ennemi que son défi était acceptée Les acclamations de l’un et de l’autre parti augmentèrent ce tumulte. « Saint George pour l’Angleterre ! » criaient les assaillants. « En aidant de Bracy ! Baucéan ! Baucéan ! Front-de-Bœuf, à la rescousse ! » répondirent les Normands, suivant les cris de guerre de leurs différents chefs.

Ce n’était pas cependant par des clameurs que la querelle devait se vider, et les efforts désespérés des assaillants furent repoussés par les efforts non moins vigoureux des assiégés. Les archers, à qui le maniement de l’arc était devenu familier par l’usage habituel qu’ils en faisaient dans leurs forêts, avaient le coup d’œil si juste, et décochaient leurs flèches avec tant d’adresse, d’ensemble et de précision, que, quelque part que se montrât un homme d’armes, quelque petite partie de son corps qu’il mît à découvert, ils ne manquaient jamais leur but. Cette volée de flèches obscurcissait les airs comme une grêle épaisse : chaque trait avait sa destination particulière, et tous étaient dirigés contre chaque embrasure, chaque créneau, chaque ouverture dans les parapets, aussi bien que contre chaque fenêtre où se trouvait, où l’on soupçonnait seulement que pouvait se trouver un défenseur. Cette décharge bien soutenue tua deux ou trois des assiégés et en blessa plusieurs autres. Mais pleins de confiance dans leurs armures à l’épreuve, et dans l’abri que leur procurait leur position, les soldats et les alliés de Front-de-Bœuf se défendaient avec un acharnement proportionné à la fureur de leurs ennemis, à qui ils répondirent par une vigoureuse décharge d’arbalètes, de flèches et d’autres projectiles. Étant moins à découvert, ils firent même aux assiégeants plus de mal qu’ils n’en reçurent eux-mêmes. Le bruit occasioné par le sifflement des flèches