Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 12, 1838.djvu/13

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soins restent à satisfaire ; le nouveau venu demande vivement à souper ; car, dit-il,

Je puis bien vous le déclarer,

Je n’avais jamais vu pareil jour expirer,
Sans que du moins, au gré de mon âme envieuse,

Je n’obtinsse une nuit joyeuse.

Le prince a beau lui donner des preuves de son goût pour la bonne chère, et lui dire qu’il est un officier de la cour qui s’est égaré à la chasse, l’avare ermite ne lui offre d’autres mets que du pain et du fromage, pour lesquels son hôte montre assez peu d’appétit ; et avec cela une eau limpide qui lui paraît moins engageante encore. Enfin le roi presse son hôte sur un sujet auquel il avait déjà plusieurs fois fait allusion sans obtenir une réponse satisfaisante :

Te voici, dit le prince, en un séjour propice
Quand de gibier ta main veut pourvoir ton office :

Cela tu le sais mieux que moi.
Quand le garde en son lit sommeille,
Tu peux sans te mettre en émoi,
Car ta prunelle toujours veille,

Abattre un lièvre agile ou quelque daim peureux.

N’as-tu pas un arc et des flèches
Pour faire à la loi quelques brèches,

Bien que tu sois l’ermite de ces lieux ?

L’ermite, de son côté, exprime la crainte que son hôte ne veuille le pousser à quelque aveu de contravention aux lois sur la chasse, ce qui, si le roi en avait connaissance, pourrait lui coûter la vie. Édouard lui jure qu’il gardera le secret, et lui fait de nouveau sentir la nécessité de se procurer de la venaison. L’ermite répond en insistant davantage sur les devoirs qui lui sont imposés comme homme d’église, et continue à affirmer qu’il est tout-à-fait innocent de pareille violation de sa règle :

Ici j’ai vu déjà s’écouler bien des jours ;
En m’abstenant de chair, j’ai vécu de laitage.
Chauffez-vous au foyer de mon humble ermitage,
Et goûtez du sommeil le paisible secours :

Sur vous ma robe en couvrira le cours.

Il paraît que le manuscrit est ici incomplet, car nous ne trouvons point les raisons qui déterminent le moine économe à faire faire meilleure chère au roi. Toutefois, reconnaissant dans son hôte un de ces joyeux compagnons tels qu’il eut rarement l’avantage d’en voir à sa table, le saint homme lui sert tout ce qu’il à de mieux dans